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  Quelle égalité ?

vendredi 2 février 2018, par Stuart Walker

Les études sur les inégalités ans le monde peuvent laisser un peu perplexe. Il y a eu des constats optimistes, comme celui de la Banque Mondiale qui estimait que le nombre de personnes disposant de moins de 1$90 par jour avait diminué d’un milliard entre 1981 et 2013, grâce à la mondialisation. Mais ce même rapport admettait que 800 millions restaient sous ce seuil. On pourrait ajouter que d’être légèrement au-dessus de ce seuil ne permet pas de vivre correctement.

Cependant la grande majorité des publications sur ce sujet concordent à dire que les inégalités dans le monde s’accroissent. Cette thèse est partagée par des chercheurs émérites comme Thomas Pickety ou les Pinson-Charlot. Pour l’ONG OXFAM, le fait que l’extrême pauvreté avait été divisé par deux entre 1990 et 2010, n’était pas incompatible avec la conclusion de 2016, réitéré à Davos, que 1% de la population avait une quasi-monopole des richesses crées mondialement.

Une des études les plus compréhensives, par l’Observatoire des Inégalités, avance que, si les calculs intègrent à la fois les écarts entre pays, et les écarts internes, la thèse de la croissance des inégalités l’emporte. Si la Chine ou l’Inde, synonymes de grandes famines dans les années ’50, ont aujourd’hui dépassé économiquement certains pays industrialisés, leurs écarts internes sont loin d’être absorbés.

Il est significatif que le pays le plus riche du monde a vu l’espérance de vie diminuer ; en même temps il se vante d’une Bourse qui atteint des sommets et accepte l’existence de 40 millions de citoyens qui vivent, non pas sous le seuil de pauvreté, mais dans l’extrême pauvreté.

L’OCDE est également de l’avis que la croissance des 20 dernières années a bénéficié davantage aux riches qu’aux pauvres dans ses pays membres, dont la France. On n’est quand-mémé pas en train de témoigner d’un dérapage incontrôlée dans l’hexagone. Tout en libérant le marché du travail, l’État a commencé a dérouler une série de mesures sociales. Le dédoublement des classes dans les zones prioritaires est un début est le début d’une transformation d’un système éducative qui reproduisait les inégalités. La réduction progressive de la taxe à l’habitation et les cotisations feront à moyen terme plus que compenser la hausse de la CSG, surtout pour les travailleurs, qui verront les résultats sur leurs feuilles de paie. La réforme de la Formation actuellement à l’étude a comme objectif de réorienter les fonds disponibles vers ceux qui ont le plus besoin. On ne peut pas douter de la sincérité d’Emmanuel Macron quand on voit les risques qu’il prend en s’attaquant aux rente et aux monopoles.

L’égalité des chances est d’ailleurs un meilleur cheval que l’égalité tout court. Si celle-ci existait, quelle raison aurait-on d’entreprendre ? C’était au nom de l’égalité que l’on avait pratiqué la Terreur en France ou laissé installer la Nomenclature en l’URSS.

La France a un niveau de redistribution parmi les plus élevés du monde, un niveau qui ne peut être maintenu qu’au coût du redressement de son économie. Sa gouvernance reste équilibrée Les droits de l’homme y sont respectés. Ceux-ci sont loin d’être un "petit bouclier". Ils nous protègent, par exemple, de la condamnation de l’indigence comme un délit, punissable par l’enfermement et des travaux forcés, ce qui était le cas en Angleterre au 19è siècle.

Dans son discours devant le Forum Économique Mondial, Macron disait "C’est aux États de trouver des accords ... contre la fuite fiscale ... et contre les inégalités." Les sceptiques diront que ce ne sont que des paroles. Mais on aurait tort de sous-estimer la puissance de la plume. Ce sont les écrits des Philosophes ou de Karl Marx qui ont changé le monde. C’était par le pouvoir de persuasion que Barack Obama avait réussi, face à une opposition acharnée, a faire accepter en Amérique une couverture médicale moderne. C’est par sa retenue et sa diplomatie qu’il a donné de l’espoir à des millions de Cubains , en enlevant l’embargo, ou battu en brèche la mainmise de l’obscurantisme en Iran avec l’accord sur le nucléaire.

C’était la publication des Pentagon Papers par le Washington Post qui a mise en marche le processus qui a mené à la destitution de Richard Nixon. La libération de la parole des femmes sur la prédation sexuelle obligera les législateurs d’en tenir compte, pour une cause qui aurait paru comme perdue d’avance.

C’est par les cris des indignés, mais aussi par une diplomatie discrètement multilatérale, qu’on pourra espérer s’approcher d’une meilleure gouvernance mondiale, faute de quoi le fermeture d’un paradis fiscal n’aura comme conséquence que l’ouverture d’une autre. En grande partie par ses excès de libéralisme financier, l’humanité a pris le tournant de tous les dangers. Les inégalités les plus extrêmes se situent essentiellement dans l’Afrique subsaharienne ou elles génèrent un engrenage de désespérance, de guerre et l’exode d millions de victimes. Nous avons tous une part de responsabilité dans cet état de choses. Si les voix qui nous alertent ne sont pas écoutées elles risquent d’être le chant de cygnes de la civilisation que nous avons eu la chance de connaître