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  Une hybris collective ?

lundi 23 novembre 2015, par Stuart Walker

L’actualité a quelque peu occulté les préparations de la COP 21. Cette conférence doit néanmoins avoir lieu, non pas parce qu’elle pourrait redorer le blason d’un Président politiquement affaibli, mais parce que l’action contre le réchauffement reste une priorité. Daech doit être combattu, mais l’unité de circonstance des grandes puissances devrait créer un rapport de forces tel que sa capacité de nuire sera sérieusement réduite. On est encore loin d’avoir le mémé front d’unité dans le combat climatique.

Pourtant la menace est planétaire et le constat n’est plus à faire. A coté des dizaines de millions de migrants qui fuient la violence, il y a autant qui fuient la sécheresse et la faim. A tel point que la situation actuelle à nos frontières peut être considérée comme une simple bande d’annonce. Les pays déshérités d’Afrique ou du Moyen Orient sont, pour une grande partie, des pays de tradition agricole. Un jeune sans activité pouvait toujours survivre en se rapprochant de la terre. Tant que ces terres ne seront de nouveau rendues cultivables les populations continueront à les abandonner massivement.

Si la désespérance continue d’évoluer au mémé rythme qu’actuellement , il pourrait y avoir des mouvements de révolte contre lesquels tous les murs et les Rafales qu’on est capable de construire ne nous protégeront pas.

Ce sont les plus pauvres qui paient le plus lourd tribut. La désertification et la famine, quand ce n’est pas la terreur, confirment aujourd’hui la véracité de ce qui a été dit il y a 2000 ans : « On te prendra le peu que tu as pour le donner a ceux qui ont » Des économistes continuent à décrier l’agriculture vivrière. Les paysans dépossédés de leurs terres, deviendront, au mieux, le prolétariat des multinationales agro-alimentaires, forestières ou touristiques. Je voudrais bien croire que ce qui est bon pour le Groupe Bolloré est bon pour l’Afrique, mais je n’en suis pas sur.

Nicolas Stern n’était pas de nature alarmiste ni mémé écologiste. Il signalait en 2006 que l’inaction sur le climat risquait de créer des turbulences telles que les 5 années d’auto-destruction à laquelle le monde s’est donné il y a 60 ans, pourraient se reproduire. Deux ans plus tard il a admis qu’il avait sous estimé l’ampleur des conséquences potentielles. Depuis les scientifiques s’accordent à dire que leurs propres estimations ont été dépassées par les événements.

Au niveau de notre politique domestique, qu’arivera-t-il à Calais si sa région est emportée par l’extrême droite ? Quelles sont les propositions de cette mouvance sur le climat ? Il est à déplorer que, lors de leurs primaires, les Verts ont choisi comme chef de file une juge sans charisme politique, en écartant le plus convaincu et convaincant de leurs porte-paroles. Ce n’était pas mieux que la plus volubile de ses politiques devienne , non pas Ministre de L’écologie, mais celle du logement. Pour ensuite prendre la porte avec fracas, en fissurant le parti le plus à mémé d’avancer sa cause.

Le lobby conservateur américain n’est pas en reste, et persiste dans le déni, en insistant toujours que le niveau de vie du citoyen américain n’est pas à négocier. Il est à peu près aussi rationnel de dire aujourd’hui que le réchauffement est un canular, que de dire que la terre est plate. Pour quelles raisons est-ce que Nicolas Stern, Nicolas Hulot, Al Gore, le Giec, et le Pape Francois se seraient-ils liguées en complot contre l’industrie ?

L’énormité du défi laisse pantois. Comment persuader les pétroliers de laisser inexploités les considérables gisements existants et potentiels ? Comment tourner le dos aux gaz de schiste, source du redressement de l’économie américaine (à laquelle la notre est toujours couplée) ? A-t-on le temps d’abandonner à la fois le nucléaire et le charbon, quand on sait que on a déjà consommé 1 des 2 degrés de marge fixés à Copenhague , avant que les conséquences ne deviennent incontrôlables ? Sera-t-il possible de dépolluer les océans des leurs vastes accumulations de plastique, ou recréer las glaciers qui irriguent une grande partie du Nord de la Chine et de l’Inde ?

Il y a quelques faibles lueurs d’espoir. Une Conférence restreinte fournira peut-être moins de déclarations d’intentions et plus de décisions concrètes. Les mentalités évoluent progressivement. Il existe des entreprises aujourd’hui qui donnent priorité à la durabilité de leurs produits plutôt qu’à leur obsolescence intégrée.

Est-il utopique de parler de gouvernance mondiale ? Nicolas Hulot rapporte que le Dalai Lama lui disait que, si on se croyait trop petit pour changer le monde, il faudrait se coucher sous une tente avec une moustique pour voir lequel des deux empêcherait l’autre de dormir .

Les états nations fonctionnent, tant bien que mal, puisque leurs citoyens cèdent, démocratiquement, une partie de leur pouvoir à une autorité qui assure un minimum d’ordre, sans lequel l’exercice des libertés est impossible. Il en est de mémé pour le monde, la globalisation ayant cavalé beaucoup plus vite que les moyens juridiques pour en limiter ses abus.

Une telle instance mondiale devrait être doté de fonds de transfert autrement plus importants que les promesses actuelles . Cela va bien au-delà des considérations morales. Elle pourrait prendre inspiration de la façon d’opérer de la Norvège. Ce pays consacre plusieurs centaines de millions par an au combat contre la déforestation au Brésil. Mais au lieu de verser les montants en amont, il attend la preuve que le nombre d’arbres qu’il a été convenu de protéger a été respecté. Le piège à éviter serait un remake des déboires de la FIFA.

Ce serait un pas dans la bonne direction. Si les grandes puissances dégagent un véritable accord elles pourraient être suivies par les autres. Le pronostic vital de l’humanité est engagé. Est- ce qu’elle souhaite léguer aux futures générations un monde meilleur, ou une poêle à frire ? C’est ce qui sera décidé par les participants du COP 21.