dimanche 22 juin 2025, par François Saint Pierre
Après l’effondrement du fascisme, le droit international s’est construit par des compromis entre les vainqueurs. Équilibre entre le monde occidental et ceux qui s’inspiraient avec plus ou moins de rigueur de l’idéologie communiste, avec la possibilité de s’exprimer, mais sans réel pouvoir pour les non-alignés. La disqualification économique des états se réclamant de l’idéologie communiste et l’évolution de la Chine vers un capitalisme sous contrôle de l’état, ont fait que la gouvernance mondiale a été largement, soit rendue impuissante, soit contrôlée par les puissances occidentales.
L’Inde, pays le plus peuplé du monde, n’est pas membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU, pas plus que le Brésil, l’Allemagne, le Japon ou le Nigeria. Le principe d’égalité entre tous les citoyens est la base de la démocratie, Pour établir un processus de gouvernance mondiale démocratique il faudrait donner des droits un peu corrélés au nombre de citoyens que représente chaque État et non à sa puissance militaire. L’état du droit international ne correspond pas au concept d’état de droit qui implique le respect des droits fondamentaux de tous les êtres vivants de la planète.
Pendant quelques années on a pu croire que l’ONU pouvait permettre, malgré la chute de l’URSS, de régler consensuellement les conflits locaux, la volonté de la Russie de retrouver sa puissance d’antan a montré les limites de notre gouvernance mondiale. La volonté d’Israël, soutenu par les EU, de régler par la force ses problèmes de sécurité a mis en lumière le "deux poids, deux mesures" du discours occidental. Justifier le bombardement de l’Iran suppose qu’il existe une hiérarchie entre les pays qui ont le droit d’avoir la bombe et ceux qui n’ont pas ce droit. Le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) n’a été respecté par aucun État possédant l’arme nucléaire, depuis son adoption en 1968. Personne n’a proposé de bombarder Israël quand il a construit sa puissance nucléaire, avec la justification qu’il n’avait pas signé le TNP ! C’est l’hégémonie occidentale qui décide qui est dans le camp du bien.
Ce qui explique cette situation c’est la domination économique et militaire du monde occidental sous le leadership américain. Cette domination est encore réelle, mais s’effrite depuis quelques années avec la montée en puissance de l’économie chinoise. Si la Chine essaye de récupérer son ancienne province de Taiwan, les EU vont-ils bombarder Pékin ?
Le problème du droit reste fondamentalement l’accord des lois, des règles et des normes instituées avec les principes fondateurs de la communauté. Si on accepte toutes les déclarations sur le droit des humains et des peuples, les décisions prises, même à la majorité, doivent être conformes à l’acceptation commune des principes. Justifier l’existence d’Israël par un vote majoritaire ne peut être acceptable que si le droit des peuples est respecté. La seule solution pour ce conflit est donc de faire en sorte que le droit des Palestiniens soit reconnu, si ce n’est pas le cas l’existence d’Israël est effectivement contestable. L’incapacité de l’ONU à défendre le droit du peuple palestinien montre l’incohérence du discours moralisateur du monde occidental.
Post-scriptum
L’Occident est un concept assez flou, qui est né lors de la division de l’empire romain en une partie occidentale autour de Rome et une partie orientale autour de Constantinople. L’Occident, région où le soleil se couche, correspondant pour le monde de l’époque à l’Europe de l’Ouest actuelle. Dix siècles plus tard dans cette région, la période de la renaissance, plus ou moins inspirée des modèles antiques, a permis un renouveau de l’art et de la culture qui a engendré des évolutions sociétales, politiques, techniques et économiques majeures. Cela a engendré une capacité de domination qui a ouvert la possibilité de créer des colonies et d’utiliser sans vergogne des esclaves. Domination qui malgré les processus de décolonisation s’est poursuivie grâce à une domination financière, industrielle, technologique et donc militaire jusqu’à aujourd’hui. Ce n’est plus au nom de la foi chrétienne que l’Occident agit ainsi, mais au nom de la gouvernance libérale présentée comme le modèle universel ultime.
Le terme Occident de nos jours regroupe l’Europe, les anciennes colonies qui ont réussi à s’émanciper comme les EU ou l’Australie et plus récemment quelques pays asiatiques comme le Japon, Singapour ou la Corée du Sud. Aujourd’hui, le cœur de l’Occident n’est plus en Europe, mais aux Etats-Unis. Si le déclencheur de cette puissance était l’art et la culture, le moteur actuel de l’Occident est la financiarisation du monde, boosté par une croissance importante de la production et de la consommation de biens et de services.
Dans ce monde occidental qui est loin d’être idéologiquement homogène, Il y a toujours eu des courants critiques, qui ont fortement contesté les tendances consommatrices, dominatrices et inégalitaires liées à la puissance et à la richesse, mais ils sont cependant toujours restées minoritaires.