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  La marche mondiale

jeudi 13 novembre 2003, par Daniel Bosc

Exposé fait lors de la rencontre du 6 novembre

Bonjour à tous. Je me présente je suis Daniel BOSC, trésorier de la Marche Mondiale contre l’exploitation des enfants issu de La Global March against Child Labour ( nous en reparlerons plus tard) et je vais vous parler de ce qui est notre combat : la lutte contre le travail des enfants en évitant de tomber dans l’aspect émotif ou même people du sujet. Donc pas de pathos. Déjà vous avez peut être remarqué 3 termes travail exploitation labour Cela mérite une définition pour éviter les ambiguïtés.

Enfants Dans les textes internationaux est enfant celui qui est mineur selon la loi de son pays ou qui à moins de 18 ans mais j’aborderais dans un instant la variabilité du terme dans sa relation au travail.

Travail : La langue anglaise dispose de deux mots, ayant une différence de sens très nette, mais tous les deux d’un usage très courant : Labour et Work. Labour correspond à une notion de pénibilité, d’exploitation possible et à une relation employeurs employés. Work a le sens de l’exécution d’une tâche sans faire intervenir la pénibilité ou une relation donneur d’ordre exécutant. Face à ce vocabulaire les langues latines ne possèdent en général qu’un seul terme et ne savent pas commodément rendre cette nuance Ces précisions sémantiques semblent secondaires mais traversent tous les mouvements et toutes les réglementations de lutte contre le travail des enfants et sont même parfois cause de scissions. Il est préférable d’utiliser le terme de l’Article 32 de la CIDE qui est exploitation et l’UNICEF a été amené à établir la classification entre : Exploitation : o Toute activité entraînant des contraintes physiques sociales et psychologiques excessives, une entrave à l’accès à l’éducation, une entrave à l’épanouissement, des atteintes à l’intégrité physique et morale et au respect de soi.

Activités économiques acceptables : o Toute activité ne correspondant pas aux définitions de l’exploitation

La réglementation internationale : Cette réglementation est construite à partir de 3 conventions internationales qui obligent les états qui les ratifient : 1er La convention 138 de l’OIT adoptée en 1973 et applicable à partir du 19/06/76

Cette convention définit avec précision l’âge minimum d’embauche qui est fonction des conditions des pays adhérents. Sa lecture doit être liée aux conventions suivantes. 2ième La Convention Internationale des Droits des Enfants CIDE de l’ONU adoptée en 1989

3ième La Convention 182 de l’OIT adoptée le 17/06/1999 applicable depuis le 19/11/ 2000 Cette convention a été adoptée sous la pression des enfants de la marche mondiale nous en parlerons dans un instant.

Elle se propose d’éliminer les pires formes d’exploitation des enfants soit : a) Toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues. b) l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant à des fins de prostitution. c) L’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant aux fins d’activités illicites. d) Les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s’exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant. Actuellement 147 pays l’ont ratifiée

La combinaison de ces instruments définit sans ambiguïté les critères des travaux à abolir :
  Tout travail d’un enfant de moins de 12 ans quelle qu’en soit la nature.
  Dans les pays dont l’éducation et l’économie sont en développement l’exploitation du travail des enfants n’ayant pas atteint l’âge de 14 ans, dans une première étape (possibilité d’activités économiques de 12 à 14 ans).
  Dans les pays développés, les enfants n’ayant pas achevé leur scolarité obligatoire ou n’ayant pas atteint au minimum l’âge de 15 ans (possibilité de d’activités économiques entre 13 et 15ans).
  Tout travail d’un enfant de moins de 18 ans engagés dans les pires formes d’exploitation visées par la convention 182. Il convient de souligner l’approche différenciée qui est faite de ce problème en fonction de l’âge des enfants, de la gravité de l’atteinte qui lui est faite, de la spécificité nationale, du volume de travail effectué soit un pragmatisme qui justifie en contre partie une mobilisation et une action renforcée.

Des chiffres pour donner la dimension du problème : D’après le rapport global de suivi de la déclaration de l’OIT de 2002

Sur 1 Milliard 400 millions d’enfants de 5 à 17 ans dans le monde :

  352 millions exercent une activité économique (211 de 5-14)
  246 millions sont assujettis à l’exploitation (1 sur 6 de la tranche d’âge)
  179 millions sont assujettis aux pires formes soit ¾ des enfants exploités.
  8 millions sont victimes de formes extrêmes telle que l’esclavage.

La répartition par activités :

  Agriculture 70%
  Industrie 8%
  Commerce 8%
  Travaux domestiques 14%
  Activités exportatrices 2,5% du total Il y a une grande prédominance du secteur informel qui est très difficile à analyser et ou les statistiques sont bâties sur des estimations. Les causes Je ne propose qu’un énoncé rapide des causes les plus évidentes sans toutefois rentrer dans une analyse plus profonde qui je l’espère fera l’objet d’un ou de plusieurs débats.

FAMILLES Endettement et pratiques usuraires. manque de terres chômage violences familiales Disparition des parents suite à la guerre aux génocides ou au VIHS/SIDA ETATS scolarisation inadaptée endettement distribution injuste du sol manque de lois protégeant l’individu Réformes structurelles imposées par le FMI RELATIONS NORD/SUD endettement protectionnisme chute des cours des matières premières tourisme sexuel RAISONS CULTURELLES

Plusieurs courants se sont attaqués à l’exploitation des enfants en mettant en œuvre des stratégies diverses avec des résultats nuancés.

Une tendance réglementaire : C’est grâce à elle que nous disposons de textes d’encadrements tant au niveau international que nationaux mais entre la création d’une loi et sa mise en œuvre effective il peut s’écouler beaucoup de temps je tiens à votre disposition des exemples..

Une tendance abolitionniste : En interdisant le travail des enfants j’ai résolu le problème. C’est du type je casse le thermomètre pour supprimer la fièvre. Cela a été les campagnes de Boycott sur l’industrie du vêtement qui n’ont eu qu’un effet limité et plus grave encore des actions comme le projet de loi au congrès US la loi Harking qui propose d’interdire l’importation aux états Unis de tous les biens comportant du travail d’enfants. Au Bangladesh cela déclenche un licenciement de près de 50.000 enfants qui se retrouvent casseurs de pierres, vendeurs des rues, prostitués. L’UNICEF et l’OIT s’associent pour régler cette catastrophe et grâce au premier souscripteur l’Allemagne crée l’IPEC qui essaye de mettre en place des programmes d’incitations économiques pour envoyer les enfants à l’école sans ruiner les familles.

Une tendance évolutionniste : Mettons en œuvre des mesures qui aident et incitent les familles a ne pas avoir recours au travail des enfants. Permettons aux enfant de passer de l’exploitation à une activité économique tel que définie par l’UNICEF c’est à dire à une éducation et à des conditions de vie permettant un développement harmonieux. Par contre agissons dans l’urgence pour les pires formes d’exploitation. C’est le type d’action de l’IPEC et de l’UNICEF. Incitons les entreprises a mettre en place une démarche d’étique sociale permettant d’assurer une production par des ouvriers payés selon les normes du pays, sans travail d’enfant et dans les respect des normes environnementales avec un contrôle indépendant. C’est à dire reproduisons dans le domaine social les mêmes types d’actions que dans le domaine de la qualité en jouant sur des labels. Cela a été l’action de mouvements comme Clean Clothes Campain et en France Etique sur l’Etiquette dont un des principaux initiateurs est Artisans du Monde qui est membre de notre association. L’évolutionnisme a pris de plus en plus conscience que la réussite de ce type d’action est liée au fait que les enfants ne doivent pas être les objets des action mais les sujets c’est à dire acteurs principaux. Nous voila au moment de vous expliquer notre genèse et nos implications dans le processus de traitement du problème.

PRESENTATION de la MARCHE

En 1997 les syndicats et des ONG organisent un congrès à Oslo ou les organisations d’enfants venant d’Amérique du Sud s’estiment mal prises en compte et font un clash médiatique pour éviter une situation de même type lors de l’assemblée générale de l’OIT devant avoir lieu en 98 à Genève plusieurs ONG à l’initiative d’un universitaire Indien Kailash Satyarthi décident de lancer la Global March against Child labour qui va mener des enfants travailleurs jusqu’à Genève pour faire valoir leurs revendications auprès de l’OIT 1998

Départ de la Global March en trois branches à partir de : o Manille o Sao Paulo o Le Cap Cette marche a traversé 107 pays et la branche provenant d’Amérique du sud est rentrée en France par Toulouse où pour la recevoir l’association Salem avait mobilisé un collectif de53 partenaires de tous horizons qui pendant 6 mois a préparé l’arrivée des marcheurs venus nous interpeller. Grâce à tous le 17 mai 1998 il y avait un défilé d’environ 5000 personnes dans les rues de Toulouse derrière les enfants marcheurs. Ceux ci furent reçus par Martine Aubry, Kouchner et Chirac et se retrouvèrent le 30 mai à Genève avec les deux autres branches. Le 2 juin ils furent reçus officiellement à l’OIT en assemblée plénière et purent exprimer leur revendication pour un monde plus juste. C’est suite à cette manifestation que l’assemblée générale de l’OIT a adopté en 1999 la convention 182 dont je vous ai parlé tout à l’heure. Un grand pas avait été franchi mais nous avons éprouvé la nécessité de pérenniser ce collectif pour cela nous avons créé l’association Marche Mondiale contre l’exploitation des enfants qui est resté en liaison avec les coordinateurs nationaux de la Global March. Nous avons entrepris des campagnes d’information auprès des adultes et des enfants pour vulgariser le problème du travail des enfants. Il nous a fallu lutter pour obtenir que la France ratifie la convention 182 le 11 septembre 2001 grâce entre autre à un lobbying acharné et à une pétition auprès du 1er ministre. A cette occasion en voyant les comptes rendus des débats parlementaires nous avons pu nous rendre compte des conséquences dommageables de l’ambiguïté entre travail et exploitation. Depuis le début du mois nous sommes engagés dans une grande opération de sensibilisation auprès des adultes et des enfants dont vous trouverez ici le programme. Le clou de cette opération sera le 23 novembre sur le stade de Balma un match organisé avec le Variétés Club contre une sélection de jeunes élèves ingénieurs de Toulouse à 15h et qui sera précédé par un grand rassemblement d’enfants du primaire et du secondaire (nous en espérons 500) en coopération avec l’USEP et de l’UGSEL.