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  Notree civilisation n’est pas un château de cartes

samedi 12 octobre 2019, par Stuart Walker

Nous ne sommes pas les premiers à imaginer que la fin du monde s’approche. L’idée d’une apocalypse était très répandue au 14è siècle lorsque la grande peste a réduit la population de l’Europe de deux tiers. Ce n’est pas le moindre des paradoxes des collapsologues que les jeunes américains qui ont fondé le mouvement ont aussi fondé des familles.

S’ils croient en leur propre survie en tant que élite avertie, ça peut ressembler à du Rousseau, mais en dit long sur le sort qu’ils réservent au reste de l’humanité. D’autant plus que ceux qui survivent à l’extinction des civilisations ne semblent pas disposer des moyens d’assurer leur propre pérennité par la suite.

Une œuvre récente du philosophe américaine, Stephen Pinker, prend résolument le contre pied du pessimisme ambiant. Que ce soit pour la paix, la faim, la surpopulation, la santé, l’espérance de vie , l’accès à l’eau et à l’éducation ou le climat, il démontre, statistiques à l’appui, les énormes progrès accomplis par la science et la technologie. Il est convaincu que l’humanité possède largement la capacité d’inverser toutes les courbes qui l’inquiètent aujourd’hui.

Il avoue cependant dans sa préface que le livre était rédigé avant l’accession de Donald Trump. L’hostilité de celui-ci envers les instances internationales, mises en place depuis 1945, a mis à mal le concert des nations. Sa politique tarifaire intempestive a généré un ralentissement économique et une instabilité mondiaux. Son retrait de l’accord de Paris a retardé de 20 ans le combat pour le climat.

Il est cependant possible que le mandat Trump ne soit qu’un hiatus dans l’histoire américaine. Il est écrit dans les manuels scolaires de chaque petit américain que leur Président ne doit pas leur mentir. Il y a peu de chance qu’ils ré-élisent quelqu’un qui ne fait que ça. Il devient de plus en plus évident que la majorité Républicaine au Sénat fait bloc derrière leur chef uniquement pour garder leurs sièges .

Ce que Trump a défait, pourra être refait par son successeur, surtout si elle se nomme Elizabeth Warren. Le programme, très détaillé, de cette avocate hors pair, comporte le New Deal Vert, qui sera relayé par les nouvelles jeunes Démocrates telles que Alexander Occasio-Cadiz.

L’Europe elle-même montre des signes d’une prise de conscience que le néo-capitalisme s’est fourré dans une impasse. Le fait d’avoir recalé plusieurs candidats à de hautes fonctions, pour conflit d’intérêts, laisse apercevoir un nouveau courant anti-populiste. C’était le Club de Rome qui, il y a plus de 20 ans préconisait a croissance zéro.

On peut imaginer une axe éclairée Euro-Américaine qui, à la suite du Pearl Harbour actuel , irait en guerre contre la prédation environnemental. L’importance de ces deux marchés cumules leur donnerait le pouvoir d’imposer un nouveau paradigme. Ils pourraient étendre dans leur constitution les droits de l’homme à tout le vivant. A eux deux ils devraient pouvoir organiser une nouvelle conférence sur le climat , et faire respecter les nouvelles engagements qui s’imposent

La constatation est aujourd’hui irréfutable, grâce à Al Gore, Nicolas Hulot , le GIEC et tant d’autres. Parmi les révélations : la fonte des glaciers de Himalayas qui cesseront d’irriguer de vastes terrains agricoles dont dépendent pour leur alimentation les populations du nord de L’Inde et de la Chine ; le fait que , si les ruminants étaient un pays, ils seraient le 3è pays polluer de l’atmosphère après les États Unis et la Chine....

Il sera relativement facile pour le bourgeois urbain de manger au restaurant bio, ou de se rendre à son emploi sur des pistes cyclables. Mais il faudrait une forme ou une autre de revenu universel pour que l’idée d’arrêter de courir plus vite pour rester sur place et enrichir son patron soit une véritable option.

Il faudra surtout un soupape de sécurité pour désamorcer l’explosion migratoire qui est loin d’avoir disparu. Cela passera par une ouverture beaucoup plus grande aux véritables déshérités qui tentent de traverser la Méditerranée. Couplé à une augmentation significative de l’aide au développement, soumise, le cas échéant, à des conditions de bonne gouvernance. On voit un début de cette possibilité auprès des jeunes démocraties en Guinée ou en Éthiopie.

L’ATECOPOL conclut , à partir du dernier rapport du GIEC, que la seule solution est la décroissance et que le green New deal est une illusion. Ceci parce que les gains d’efficacité énergétique stimulent la demande, ce qui relance la dépense énergétique.

On peut cependant préférer la croissance sélective. L’ampleur de la tache est déjà immense, sans vouloir aller d’un extrême à l’autre Un pays ne peut pas acter les mesures écologiques nécessaires sans les moyens de le faire. D’éventuelles nouvelles dépenses énergétiques pourraient être limitées par une fiscalité sur tout produit dépassant un certain seuil d’empreinte carbone.

Il existe d’autres éléments de solution : la création d’un fonds de quelques dizaines de milliards pour faciliter la transition, le développement d’un marché d’investissements " propres ", sans actions dans des sociétés minières ou excessivement énergivores, une " taxe Tobin " sur les transactions purement financières, le démantèlement des monopoles GAFAM, pour qu’ils soient soumises aux mémés impositions que les entreprises moyennes...

Mais il s’agit effectivement de s’adapter ou de sombrer. L’opinion publique s’approche à petits pas à l’idée que, soit on accepte les sacrifices nécessaires de façon volontaire, soit elles s’imposeront d’eux-mêmes beaucoup plus violemment. Non seulement on ne regarde plus ailleurs, mais on commence à agir. Notre civilisation est le résultat de plusieurs siècles d’évolution et d’expérimentation. Dire qu’il est trop tard pour la sauver, c’est céder aux idées négatives , sans doute plus excitantes pour nos neurones que des scénarios constructives.