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  Diversité et égalité

samedi 28 mars 2015, par Stuart Walker

La loi de 1905 paraît effectivement comme une pierre de voûte d’un bastion global contre tout qui ressemble à un retour des guerres de religion. Ce n’est pas le moment d’abandonner ses principes. Cela passera par une plus grande proportionnalité pour nos deux religions les plus éminentes en termes par exemple de nombre d’édifices, de jours de congé ou d’écoles sous contrat. Un assouplissement sur la réglementation vestimentaire ne serait pas non plus de trop. La position de la France est assez largement incomprise. Il existe en Angleterre des femmes policières musulmanes qui portent le foulard pendant l’exercice de leurs fonctions. Son port à l’école vient d’être autorisé en Allemagne

On devrait d’ailleurs parler de femmes « foulardées ». Il y a un monde de différence entre un vêtement qui ne cache que les cheveux, et un autre qui voile la face.

Des ressortissants du Maghreb sont morts pour nous pendant la dernière guerre. D’autres ont travaillé dur dans la redressement de l’industrie. Ils sont nombreux à assumer aujourd’hui des emplois ingrats dans le bâtiment, l’alimentaire ou les transports. Ce n’est que justice élémentaire de tout faire pour qu’ils se sentent chez eux en France.

C’est autant une question d’intérêt que de principe. Platon disait que les hommes correspondaient soit à l’or (sa catégorie) soit à l’argent (on dirait les cadres de nos jours) soit aux métaux inférieurs , dont le rôle était de subvenir aux besoins des autres. Aujourd’hui on reconnaît que ce sont les alliages qui sont le plus fort.

Si l’Amérique détient la puissance qu’on lui connaît, c’est qu’elle l’a compris depuis ses débuts. Même si de grandes inégalités perdurent, c’est un pays qui a beaucoup fait pour combattre le racisme au moyen du « black empowerment » De nombreuses sociétés, si elles ne pratiquent pas ostensiblement un système de quotas, s’affichent dans leur documentation comme des « equal opportunity employers »

L’échec de l’intégration française n’est pas total. Il existe une « beurgoisie » musulmane, républicains convaincus, qui ont montré la voie. Selon un sondage d’Ipsos en Janvier, l’idée que l’Islam modéré est compatible avec la République est en progression, même si elle reste légèrement minoritaire. Il faut reconnaître cependant que Londres a plus d’attractivité que Paris. C’est sans doute en partie du au fait que 200 nationalités s’y côtoient. De façon générale cette capitale connaît probablement des taux plus élevés d’aptitude aux études, de mobilité sociale, d’employabilité et mémé d’inter-mariage que son équivalent français.

Si l’apartheid est une politique voulue, la réalité de la ségrégation en banlieue est un processus plus spontanée. Les semblables se sont toujours assemblés. Les meilleures écoles attirent les meilleurs profs. Les habitants des « ghettos blancs » deviennent exclusifs ou déménagent aux premières manifestations de mixité.

Il faudrait démultiplier les initiatives de Richard Descoings qui permettaient des passerelles d’accès à l’école Polytechnique. Le système de cousinage entre les alumni des grandes écoles a souvent été dénoncé. Ce qu’on sait faire doit remplacer son appartenance à une caste comme critère d’emploi. Des origines modestes ou étrangères , la méconnaissance des codes, ne doivent pas être une barrière à l’accès aux responsabilités. Davantage d’enfants de femmes de ménage doivent pouvoir devenir pilotes ou juristes. Kennedy avait forcé des écoles blanches à accepter des enfants noirs en en organisant le transport par bus de ces derniers, accompagnés par les forces de l’ordre.

On pourrait aller plus loin que des cv. anonymisés en facilitant les démarches de changement de nom. Combien d’immigrés juifs aux États Unis avec des noms imprononçables sont devenus des Cohen ? Est-ce que Bob Zimmerman aurait connu autant de succès que Bob Dylan ? Personne n’a trouvé à redire quand Nicolas de Battenberg est devenu Lord Mountbatten.

Il y a des initiatives concluantes dans des pays anglo-saxons pour attirer les meilleurs produits des universités dans les écoles les plus difficiles, moyennant un contrat de 2 ans et une formation accélérée tenant compte de qualités humaines comme l’écoute ou la résilience. Cette expérience leur facilite une conversion par la suite vers la direction d’un établissement ou un rôle de conseiller pédagogique. Est-ce que l’éducation Nationale peut prétendre remplir sa mission quand tant d’adolescents sont prêts à avaler la propagande islamo-terroriste ?

Il ne faudrait pas que les libertariens du Web empêchent le génie informatique français de mobiliser tous les algorithmes nécessaires pour bloquer ces sites, tout en déployant une contre-propagande efficace. L’incarcération d’apprenti jihadistes revenant de Syrie s’impose également. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne puisse pas être accompagnée de tentatives psychologiques de désintoxication. Les Américains (encore eux) ont une longue expérience de ces techniques, utilisées initialement dans le cas de jeunes endoctrinés par des sectes.

Le nombre incalculable de livres et rapports ont été publiés sur l’éducation ont peut être négligé un point qui devient primordial aujourd’hui : elle ne doit pas se limiter à inculquer des compétences. Michel Cymès nous raconte comment des médecins de haut niveau ont été capables des pires atrocités. Le CV du chef actuel de Daesh comporte un doctorat en théologie de l’université de Bagdad. La sécularisation de la société n’est pas forcément une mauvaise chose, mais il ne faudrait pas que le bébé parte avec les eaux sales. Une éducation digne de ce nom doit comporter un volet civique permettant de partager un minimum de valeurs universelles humanistes. L’étude de l’histoire des religions doit aussi avoir toute sa place.

On a dit et redit que une bonne maîtrise du français était une clé de l’intégration. L’époque est révolue ou il était possible de « fabriquer un français » en l’inscrivant dans une école ou il serait le seul étranger dans sa classe. Combien d’interpellations ont tourné mal parce que le sujet ne pouvait se défendre qu’agressivement ? Et pourtant les associations dédiées à l’apprentissage du Français ont fondu comme neige au soleil, et l’anglais continue de prendre la part du lion dans les études de langues.

Le Service Civique pourrait être un moyen de canaliser les aspirations humanitaires de nos jihadistes. On pourrait dire , après coup, que c’était une erreur d’abolir le service militaire sans solution de rechange pour occuper et former une grande partie de la jeunesse , tout en leur donnant quelques bases d’auto-discipline.

Le financement est un obstacle ? Re-orienter une partie des indemnités et autres privilèges de nos élus devrait aider à le surmonter. C’est une curieuse façon de défendre l’égalité que de mettre à disposition de nos Sénateurs un restaurant exclusive ou le coût des plats commence à une centaine d’euros.

La loi de 1905 semble être imprégné de modération. En même temps celle-ci ne peut pas faire l’abstraction de la tolérance zéro de la barbarie et de son apologie. Dans leur attachement aux libertés fondamentales les Anglais, dans les années ’50, laissaient libre cours aux discours de haine à Hyde Park, qui était même devenu une attraction touristique. Cette angélisme a été mal récompensé par l’installation de cellules terroristes qui estimaient qu’elles n’avaient rien à craindre de la justice anglaise, suivie plus tard par des attentats meurtrières. Une des conséquences est une densité de caméras urbaine quasi inégalée en Europe.

Ceci n’empêche pas des concours coraniques d’avoir lieu dans ce pays pour familiariser la population avec cette culture. Dans son temps Tony Blair avait autorisé des tribunaux locaux coraniques à juger des litiges de famille ou de voisinage .

Une plus grande mixité pourrait être favorisée par des mesures d’ingénierie démographique à l’aide de statistiques ethniques. Celles-ci ne sont pas contestées outre Atlantique. Une démocratie forte ne devrait pas craindre leur détournement. La médecine préventive est efficace dans la mesure ou elle est accompagnée par des diagnostiques régulières. Mieux connaître la composition des populations permettrait de répartir plus équitablement des aides ou investissements

Un autre tabou qui pourrait tomber est la dé-criminalisation du cannabis. Si des jeunes sont capables d’organiser ce commerce illégalement dans des cages d’escalier, ils devraient pouvoir le faire légalement avec pignon sur rue.

Le chemin vers une réelle interculturalité sera longue, mais on peut prendre les premiers pas. A commencer par exemple par une plus grande modération dans l’usage de la liberté d’expression. L’action de quelques caricaturistes a froissé les sensibilités d’un grand nombre de musulmans apaisés pour qui Mahomet est une inspiration de comportement quotidien. Ils seraient les premiers à condamner le détournement de leur religion par des assoiffés de pouvoir. Mais ce n’est pas sur que le meilleur traitement d’un psychopathe soit la dérision, surtout quand elle provoque des émeutes à travers le monde et fait atteindre le coût de la sécurité en France à 1 million par jour.

La jurisprudence est d’ailleurs assez ambiguë. Elle condamne apparemment des injures envers une personne à cause de son appartenance, mais pas les attaques contre une religion. Est-ce que le commun de mortels apprécie la différence ? Le pontife le plus éclairé de l’histoire a émis de sérieuses réserves à propos de ce type de provocation.

L’objectif du vivre ensemble demande des concessions de part et d’autre dans la zone grise de questions qui ne peuvent être réglées autoritairement ni par la loi coranique, ni par la loi française , qui sont toutes les deux complexes et contradictoires à volonté.

Nous avons besoin à terme d’un Islam de France qui a fait son aggiornamento, qui s’est unifié, doté d’un interlocuteur unique et des Imams formés. Force est de reconnaître que l’époque ou il donnait au monde l’équivalent des Prix Nobel, notamment en mathématiques et astronomie, a pris fin au douzième siècle. Ces jours reviendront peut être, mais pour le moment il semble être plutôt un frein au développement même dans les pays arabes les mieux gouvernés. Il est encore plus loin d’accepter des cadres féminins dans son sein que l’église Catholique. La méfiance d’une cinquième colonne à la Houllebecq restera forte tant qu’il n’aura pas accepté officiellement la séparation des pouvoirs.

Un compromis sur les édifices pourrait servir d’exemple. En retour d’un financement, l’état pourrait demander des prêches en Français. La présence de caméras , comme cela se pratique ailleurs, garantirait leur sécurité, rassurerait les sceptiques, et permettrait la diffusion des offices sur le médias. On accepte le son de cloches ; celui du muezzin n’est pas forcement plus désagréable.

Théoriquement nos édifices abandonnées pourraient être cédées à ceux qui n’en ont pas. Voltaire disait bien que ce que les grandes religions ont en commun est plus important que ce qui les divise. Pourquoi se braquer sur des questions de liturgie ou rituel quand l’essentiel tourne autour de valeurs comme la mansuétude ou l’entre’aide. ? Ce n’est pas une énormité que de suggérer que la meilleur religion est celle de son pays.

Une industrie halal est une autre revendication du Parti Musulman de France, allié du Centre. Une bonne pédagogie permettrait de comprendre que, si des pratiques alimentaires religieuses avaient à l’origine un fondement pragmatique, tel n’est plus le cas.

Pour pousser la modernité plus loin, halal ou pas halal, on maintiendra notre niveau de consommation de viande seulement au prix de creuser les inégalités dans le monde. On ne peut pas s’étonner que les populations du Sahel prennent les armes quand on leur demande de mourir gentiment de faim pour nous permettre de continuer à déguster des steaks chateaubriand.

A l’époque de Martin Luther King les églises noires ont joué un rôle important dans la lutte contre la ségrégation. Cette même lutte pourrait être une des vocations d’un nouvel Islam réformé de France.