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  Réforme territoriale et Grand Sud-Ouest

mardi 23 septembre 2014, par Christian Bressan

Lors de l’inauguration d’un équipement public d’une commune, sept représentants de collectivités ayant chacune participé à une part de financement ont découpé une partie du ruban et fait un discours nécessairement répétitif et ennuyeux : commune, intercommunalité, département, région, état, Europe.

Mais le plus critiquable comme le déplorait le président de région est que sept services différents ont dû instruire des dossiers identiques. Par ailleurs ces nombreux financements étaient-ils tous justifiés et certains n’étaient-ils pas politiquement complaisants ?

Cette duplication d’instruction administrative et de néfastes financements croisés est une source de gaspillage public évident qui justifie à elle seule la nouvelle réforme territoriale.

Une majorité de français la juge nécessaire et souhaite réduire cette accumulation de strates souvent appelée « mille-feuille territorial » Mais le projet de redécoupage régional proposé ne les satisfait pas pour autant et suscite de nouvelles questions. Comme la suppression des départements vidés progressivement de leurs compétences avec la création des intercommunalités sur une base minimale de 20 000 habitants, qui en feront une coquille vide, suscite également beaucoup d’interrogations. Le découpage actuel des régions date de 1972 et n’avait à l’origine qu’un caractère administratif afin de rationaliser l’organisation territoriale des services de l’Etat.

Mais les lois de décentralisation ont permis aux régions d’affirmer leurs spécificités économiques et culturelles dans le contexte national et européen voire mondial. Ce qui a permis de mieux identifier et valoriser les territoires que leurs populations se sont maintenant appropriés et auxquelles elles restent attachées.

Dans un tel contexte il ne sera pas facile de modifier ces territoires régionaux, d’autant plus que les oppositions politiques sont nombreuses et de surcroît dans le camp également de ceux qui proposent cette réforme, qu’il n’existe probablement pas de carte consensuelle des régions. Ce qui peut expliquer que le gouvernement ait proposé sans concertation préalable un projet et aussi que nous ne le comprenions pas. S’il est clair que l’objet de la réforme est de faire des économies, le projet pour y parvenir l’est beaucoup moins et nous ignorons les aspects pris en compte pour le définir. Notamment pour le grand sud-ouest qui nous intéresse.

S’agit-il d’une approche économique reposant sur des coopérations ? Entre l’Aquitaine et Midi Pyrénées autour de l’aéronautique, l’espace, l’agroalimentaire, l’agriculture, c’est déjà fait avec les 2 pôles de compétitivité communs aux deux Régions Midi Pyrénées et Aquitaine qui sont Aerospace Valley » et « Agrimip Sud-ouest Innovation ». Ce qui n’existe avec aucune des autres régions voisines.

S’agit-il d’une approche fondée sur les grandes infrastructures communes existantes et futures ?

Les régions Aquitaine et Midi Pyrénées situées dans le même bassin versant « Adour Garonne » sont concernées par des problèmes naturels identiques : gestions de la ressource en eau et de la Garonne, agriculture de même nature ; par les mêmes infrastructures de communication : A 62, liaisons ferroviaires et future LGV, canal latéral à la Garonne. Ce qui n’existe autant avec les autres régions voisines.

S’agit-il d’une approche fondée sur les aspects culturels ou sociologiques ? Aucune autre région voisine ne possède plus de proximité avec l’une ou l’autre des régions Aquitaine et Midi Pyrénées à l’égard de ces aspects qu’il n’en existe entre celles-ci. Un exemple significatif est donné par l’histoire. Dès le Moyen Âge, le sud-ouest de la France est une zone de friction entre les rois de France et d’Angleterre, à cause du Duché d’Aquitaine et du Comté de Toulouse. Les conflits ont conduit à la construction des bastides selon des principes urbanistiques et architecturaux précis et communs. Que l’on trouve de Libourne à Carcassonne et de Rodez à Mont-de-Marsan vaste territoire aquitain et midi pyrénéen. De nombreuses similitudes de comportement et de culture se sont ainsi forgées au cours du temps dont une langue commune l’occitan. Et que dire plus près de nous de l’importance et de l’antériorité de la pratique du rugby tant en Aquitaine qu’en Midi Pyrénées comme des pratiques culinaires conviviales et festives ?

On ne peut nier les nombreux liens géographiques, naturels, structurels, économiques, culturels et de société entre l’Aquitaine et Midi Pyrénées, qui n’existent autant avec aucune autre région voisine et qui justifient l’intérêt pour elles d’être regroupées.

Le projet proposé qui réunit Midi Pyrénées et Languedoc Roussillon semble davantage répondre au souci de satisfaire les présidents régionaux actuels du grand sud-ouest afin de préserver leur territoire, que de respecter les particularismes historiques, géographiques, socioéconomiques.

Les régions ne sont pas que des découpages administratifs, mais l’expression de nos terroirs. La logique impose de construire un grand sud-ouest et l’avenir des élus devant l’organisation durable du pays est dérisoire. Quant à savoir si une capitale régionale unique est nécessaire la réponse est évidente, l’entité régionale n’est qu’un simple territoire spécifique ayant reçu délégation de compétences du pouvoir central de l’Etat. Une capitale ou un chef-lieu ne sert qu’à flatter l’égo des élus !

Pourquoi une seule capitale par région ? On ne va pas déplacer les personnels et les moyens sur ces nouveaux et vastes territoires. Il ne saurait y avoir qu’une seule capitale par région. L’hémicycle de région, les bureaux de l’exécutif, les sessions et autres réunions peuvent se tenir dans tous lieux capables. Les nouvelles régions issues de fusion vont posséder plusieurs hôtels de régions et de départements très souvent récents et somptueux bien suffisants, il serait scandaleux de ne pas tous les utiliser tant pour les personnels que pour les élus.