Le Café Politique

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  Des interrogations, des éléments de réponses

vendredi 18 novembre 2011, par Nicolas Piluso, Stuart Walker

QUELQUES INTERROGATIONS

Je serai heureux de demander au conférencier la définition de quelques expressions, souvent utilisées, mais pas toujours comprises, telles que : le PIB, les taux de change, les sub primes, les marchés, les obligations, une dette souveraine, un hedge fund ......

D’autres points ou des éclaircissements seraient les bienvenus : • Quel est l’intérêt d’acheter des dettes ?

• Comment les puissances financières peuvent-elles "attaquer une économie" ?

• Si "les marchés" n’aiment pas l’instabilité, pourquoi est-ce qu’ils s’évertuent à la provoquer ?

• Quel intérêt auraient-ils à créer un 1929 bis ?

• Si l’Europe pouvait émettre des euro-obligations, et ainsi imprimer du papier à volonté, est-ce que la conséquence ne serait pas un endettement global accru, et une situation encore plus catastrophique que celle des États Unis ?

• Ou finit l’investissement à risque, & ou commence la spéculation ?

• Comment les Agences de Notation sont-elles financées ?

• Comment est-ce qu’une dégradation par une seule agence peut-elle être aussi redoutable lorsqu’elles sont trois à exercer cette vocation ?

• Comment est-ce qu’on peut dire que l’économie de l’Italie est moins menacée que celle de la France ("sa dette hors intérêts est saine") quand ses remboursements lui coûtent plus cher ?

• Si l’Allemagne n’avait pas redressé son économie par l’austérité, ou serait-on aujourd’hui ?

• Pourquoi est-ce que la France encourage la natalité dans un environnement de chômage galopant, sachant que l’Allemagne s’en sort plutôt mieux avec une démographie faible ?

• Comment peut-on prôner "la croissance" comme panacée, dans un continent avec un niveau de consommation démesurée par rapport au tiers monde

pour n’en citer que quelques-uns

Stuart Walker

Quelques éléments de réponses :

 le PIB, sans entrer dans une définition technique, est la richesse produite (par le secteur marchand et non marchand) à l’intérieur d’un territoire donné. Cette richesse est répartie sous forme de revenus entre, grossièrement, les salaires et les profits.

 le taux de change, c’est le cours d’une monnaie par rapport à une autre, c’est à dire la quantité de monnaie A qu’il faut céder pour obtenir une unité de monnaie B. 1 dollar= 1.2 euro est un taux de change.

 les subprimes sont des crédits hypothécaires à taux variables. Accordés à des ménages à faible revenu, ils ont permis de financer des projets immobiliers à faible taux d’intérêt pendant les deux premières années. Mais l’augmentation des taux d’intérêt a ensuite mis les ménages dans une situation de cessation de paiement.
 une obligation est un titre de créance matérialisant un emprunt. Lorsque j’achète une obligation, cela signifie que je prête de l’argent au vendeur qui me fait la promesse de me rembourser et de me payer des intérêts.

 la dette souveraine est la dette des États (non pas la dette d’une économie, mais la dette des administrations publiques) -un hudge fund est, en quelque sorte, un club d’investissement qui gère des portefeuilles de titres financiers d’une clientèle très fortunée ou d’institutionnels de façon ultra-spéculative, en prenant des risques très élevés. On parle de spéculation lorsqu’une transaction s’effectue sur la base d’une anticipation sur le prix futur du titre. Il s’agit d’une stratégie de court terme qui vise à jouer sur la variabilité des cours. L’investissement relève d’une logique toute autre, puisqu’il s’agit d’une transaction basée sur une prévision de rentabilité à long terme (la rémunération que vont pouvoir offrir les titres ; par exemple, j’investis dans Total si je pense que cette firme fera des bénéfices élevés sur les 5 prochaines années).

Les marchés ont intérêt à une certaine dose d’instabilité sur les marchés car les gains à court terme puisent leur source dans cette instabilité. N’oublions pas le fait que s’il y a spéculation, c’est parce que les cours sont variables. Mais si l’instabilité des marchés impacte négativement l’économie réelle, les marchés n’y ont pas intérêt. Il faut alors dissocier la rationalité individuelle des acteurs de la finance et la combinaison des comportements individuels qui donne un résultat non désiré à l’échelle du marché tout entier.

Exemple : je crains que la Grèce ne me remboursera pas, donc je vends à quelqu’un d’autre une partie de mes bons du trésor grecs. Mais si tout le monde fait cela, il en résulte une hausse du taux d’intérêt qui va effectivement entraîner la Grèce dans la tourmente.

Les attaques spéculatives prennent généralement la forme de ventes massives de titres ou d’une monnaie. Les capitaux quittent le pays en question, ce qui engendre une baisse des cours de bourse et une baisse du cours de la monnaie en question.

L’intérêt d’acheter des dettes, c’est de percevoir un intérêt, c’est -à dire voir son épargne rémunérée, un peu comme le travail est rémunéré par un salaire pour le salarié. En ce qui concerne les agences de notation, ce sont les fonds d’investissement, les banques, les sociétés cotées et les États, qui les payent.

•Quel intérêt auraient-ils à créer un 1929 bis ?

Certains Hedge Funds possèdent des CDS (Credit Defaut Swap) sans pour autant avoir dans leur portefeuille les titres de la dette publique correspondants. Le CDS est une assurance à laquelle souscrit l’investisseur pour se prémunir du risque de défaut d’un Etat (risque de ne pas être remboursé). Mais le problème est que l’on peut acheter et spéculer sur des CDS sans pour autant avoir prêter de l’argent à un ETat. Par conséquent, les fonds qui possèdent des CDS ont tout intérêt à la faillite des États puisqu’ils toucheront alors de leur assurance un remboursement sans pour autant avoir perdu quelque chose puisqu’ils n’ont pas le titre de dette sur lequel l’État a fait défaut.

•Comment est-ce qu’on peut dire que l’économie de l’Italie est moins menacée que celle de la France ("sa dette hors intérêts est saine") quand ses remboursements lui coûtent plus cher ?

Parce que son solde primaire (solde des recettes et des dépenses avant paiement des intérêts) est excédentaire. Mais compte tenu de l’explosion du taux d’intérêt demandé à l’Italie, la menace reste très grande...

•Si l’Allemagne n’avait pas redressé son économie par l’austérité, ou serait-on aujourd’hui ? Le FESF n’aurait peut être pas pu voir le jour puisqu’il repose sur la capacité d’emprunt des États les mieux notés par les agence de notation...Mercredi 23 novembre, la Finanzagentur (l’agence chargée de placer la dette allemande), a tenté de lever 6 milliards d’euros d’emprunts à dix ans. Mais la demande ayant fait défaut, le pays n’a emprunté que 3,6 milliards d’euros. Cette situation montre bien qu’aucun pays de la zone euro n’est aujourd’hui épargnée par la crise de liquidité et qu’une intervention de la BCE se fait de plus en plus pressante.

•Pourquoi est-ce que la France encourage la natalité dans un environnement de chômage galopant, sachant que l’Allemagne s’en sort plutôt mieux avec une démographie faible ? Il est impossible d’établir une relation mécanique de cause à effet entre croissance démographique et chômage parce que la clause "toutes choses étant égales par ailleurs" n’est pas acceptable. Certes, la croissance de la démographie alimente les flux entrants sur le marché du travail. Mais c’est sans compter que la démographie constitue un stimulant de la croissance économique et donc des créations d’emplois.

•Comment peut-on prôner "la croissance" comme panacée, dans un continent avec un niveau de consommation démesurée par rapport au tiers monde. Dans une société capitaliste, la croissance économique est le nerf de la guerre. Elle est liée à la nature même du capitaliste dont le moteur est l’accumulation du capital. C’est elle qui autorise les créations d’emplois et le financement au moins partiel des investissements. Elle permet d’apaiser les tensions qui se nouent autour du partage des richesses et autorise l’augmentation simultanée des salaires et des profits. Elle aide à la réduction des déséquilibres des comptes publics. Enfin, d’un point de vue écologique, la reconversion écologique des économies ne pourra pas se faire sans croissance...

Nicolas Piluso