Le Café Politique

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  Que peut-on faire ?

mise à jour du 17/05/2006

lundi 15 mai 2006, par Olivier Dirat

Il est de plus en plus courant d’avoir une discussion où les personnes, venant de classes sociales différentes, profitant plus ou moins de la "mondialisation", arrivent à la conclusion que nous sommes en train de détruire notre monde qui plus est en suivant un mode de vie qui ne nous rend pas particulièrement heureux. Ce même modèle ne répond pas non plus à la question sociale du chômage ni à l’accès aux soins pour tous, etc... Le constat est là, partagé par la majorité des Français et qu’en faisons-nous ?

Nous pourrions déjà changer notre consommation. Consommer Bio mais surtout local afin d’éviter les transports inutiles, n’acheter une voiture que lorsque nous en avons besoin, économiser l’énergie et l’eau, ne pas avoir de télévision écran plasma et un lecteur DVD à 40 euros fabriqué dans des conditions dont nous sommes tous conscients. Chacun de ses actes peut permettre d’aller dans une direction meilleure et nous faire économiser de l’argent. Et ainsi se rendre compte que nous n’avons peut être pas autant besoin d’argent. Et avec cet argent nous pourrions par exemple acheter une éolienne ou s’équiper avec un chauffe-eau solaire. Ou tout simplement prendre plus de temps pour les vacances et ainsi pouvoir se déplacer plus lentement sans utiliser l’avion.

Nous pourrions aussi ne plus regarder la télévision et en profiter pour lire, pour rencontrer ses voisins, faire son potager si on a un bout de terre. Nous pourrions nous organiser pour aller travailler en transport en communs, en covoiturage ou en vélo. Nous pourrions aussi ne plus aller au supermarché, mais favoriser les petits commerces et dans ces petits commerces, ceux qui vendent plutôt des produits locaux que des produits venant de pays lointains et aggravant ainsi la pollution de déplacement.

Mais si nous consommons Bio, alors nous allons mettre au chômage des gens. Si nous n’achetons plus de voitures, de télés, de lecteur DVD, nous allons mettre au chômage des gens. Si on ne prend plus l’avion, alors EADS va fermer et mettre au chômage des gens. Si on ne regarde plus la télé, les personnes qui travaillent dans la publicité vont se retrouver au chômage. Et ainsi de suite, pour chaque solution envisagée.

Alors que faire et est ce que l’argument "on va mette les gens au chômage" est valable ?

Commençons déjà par constater que le chômage existe déjà et est souvent décrit comme un "chômage de masse". La question est, est ce que cela va le faire empirer. Ensuite, qu’il faut toujours plus de main d’œuvre pour faire quelque chose proprement que salement. Que ce soit une voiture, un tee-shirt ou du pain.

Il est donc logique de penser que ce mode de "consommation" va créer plus d’emplois qu’en détruire. La croissance semble être un préalable à beaucoup de solutions, du moins dans l’esprit des dirigeants politiques actuels, qu’ils se situent à droite ou à gauche (je parle des partis de gouvernements, ceux susceptibles d’accéder au pouvoir dans notre république). Ce paradigme est de plus en plus remis en cause, y compris par certains militants ou courants à l’intérieur de ces partis.

Il y’a donc là plus un problème idéologique et transitoire que structurel. La question qui par contre est sous jacente, c’est l’argent et la répartition de celui-ci. Il est clair que tant que nous restons dans une logique capitaliste très dure et valorisant le capital plutôt que le travail, le partage va être compliqué. Cet argent qui semble être la seule valeur partagée par tous semble être une solution alors qu’il serait plus proche du problème. Le proverbe, l’argent ne fait pas le bonheur semble être admis par tous et, bien que les gens disent chercher le bonheur, il ne semble pas que la question d’avoir moins d’argent pour avoir plus de bonheur soit débattue. Pourquoi cela ? Comment cette façon de voir s’est elle imposée ?

La décroissance pose énormément de questions mais par contre, il n’est pas indispensable de répondre tout de suite à toutes et définitivement. Il est plus simple de se dire que c’est logique de faire comme ça et de se demander qu’est ce que je peux faire et qu’est ce que je veux faire.

L’alimentation me semble le meilleur des points pour commencer car elle apporte une satisfaction immédiate et va naturellement impliquer d’autres sujets. En mangeant mieux, il faut acheter à des endroits différents, faire la cuisine d’une façon différente et à des moments différents. De plus, l’alimentation est directement liée à la santé mais aussi à la philosophie ou morale. Un exemple, si tout le monde sur Terre était végétarien, tout le monde mangerai à sa faim. La protéine animale étant très coûteuse en protéine végétale, une grande part des cultures végétales et céréalières sont destinées à la nourriture animale. 90% du soja cultivé est ainsi destiné à l’élevage. Il en est de même pour la pêche industrielle qui vide nos océans mais qui donne du travail. Saviez vous que le tiers du produit de la pêche sert à la nourriture d’animaux d’élevage ? Pour ceux qui ont vu le film "Le cauchemar de Darwin", il semblera par exemple tout à fait immoral de manger de la perche du Nil quand l’on sait l’impact que cela a sur l’économie locale, l’écosystème du lac Victoria et surtout les populations. Consommer ou non des OGM est aussi un choix alimentaire, politique et philosophique.

Donc, l’alimentation en premier ! Et en deux, je dirai la télévision. Car une grande part de notre assujettissement à un système qui nous fait du mal et ne nous convient pas passe par là. La propagande (le mot est fort mais je pense juste) économique passe principalement par là et de plus, cet objet capte une quantité de temps absolument énorme, un temps qui est complètement perdu pour tout le reste. La télévision est aussi selon Bourdieu et Passeron un instrument de la violence symbolique, imposant à travers le crédit que nous lui accordons les représentations de la classe sociale qui profite le plus du système actuel. Ces symboles se retrouvent chez les enfants mais aussi chez les plus grands. De plus, la télévision, pensée comme un outil de contre pouvoir (pensée, ou plutôt auto proclamée) joue plus un rôle de maintien de l’ordre qu’un rôle d’émulation et ou critique. Le consentement implicite des téléspectateurs, pour bonne part inconscient, permet de perpétuer un mode de fonctionnement de la société allant à l’encontre du besoin de changement. Il n’est pas facile de se séparer d’un instrument tant utilisé et additif, c’est un effort qu’il ne faut pas minimiser. Mais à gros effort, grosse récompense !

Maintenant, si nous pensons à l’urgence, il est indispensable de modifier notre consommation énergétique. Il devient de moins en moins envisageable de continuer sur notre rythme actuel de combustion des énergies fossile (pétrole, gaz, charbon). C’est une responsabilité que nous avons envers les générations futures. Notre passage à l’âge adulte ne peut se faire qu’avec l’abandon de ces égoïsmes narcissiques faisant penser au mode de fonctionnement d’un nouveau né. Il est douloureux pour un bébé de se confronter à la réalité, mais c’est une étape indispensable. La Terre jouant le rôle de la mère, elle est la pour nous confronter au principe de réalité qui pondère le principe de plaisir si cher à Freud. Quelque soit l’angle selon lequel on regarde les réserves énergétiques, nous ne pourrons pas continuer à consommer de l’énergie à ce rythme. La seule issue possible est de faire décroitre notre consommation. L’énergie étant utilisée pour les transports, l’industrie, l’habitat et l’agriculture, il n’est pas difficile d’imaginer des solutions croisées. Moins gaspiller d’énergie pour se chauffer, moins transporter les produits bruts ou manufacturés (consommer local), rénover les formes d’agricultures. Si nous mettons en parallèle les préoccupations sur l’obésité en France, les problèmes de surplus de production agricole et la nécessaire économie à faire tant sur l’eau que sur les hydrocarbures, des solutions viennent naturellement à l’esprit. La mode des 4x4 n’est pas non plus de celles qui vont faire de nous des adultes. Ceci juste pour montrer qu’il n’est nul besoin d’avoir fait de hautes études pour envisager des solutions. Solutions qui jusqu’à présent ne sont proposées sérieusement par aucuns des partis de gouvernement.

Alors, c’est à nous de montrer l’exemple, de faire partager nos préoccupations autour de nous, d’essayer de persuader afin que petit à petit les habitudes changent. Chaque petit pas dans le bon sens est énorme.