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  Quelles urgences pour la gauche aujourd’hui ?

vendredi 26 mars 2021, par Jean-Pierre Lorré

Essayer de réfléchir à l’avenir de la gauche française et à ses combats revient à interroger notre modèle de société et son évolution. C’est un vaste sujet dont j’esquisse ici un point de vue. Essayons d’abord de définir le sujet : qu’est-ce que la gauche ? qu’est-ce qu’être de gauche ? ; une question par ailleurs d’actualité à l’heure où l’on célèbre l’emblématique 150ᵉ anniversaire de la commune de Paris :

• Sans revenir à sa genèse, la notion de gauche est intrinsèquement liée à l’histoire des combats sociaux en France ; elle s’y est investie et les a fait progresser. Elle met en avant l’intérêt de l’humain.

• Notons que cette gauche a souvent été divisée et de nombreux courants l’ont traversé. On peut citer parmi bien d’autres : Montagnard / Girondins, Anarchisme / Communisme / Socialisme et de nombreuses figures l’ont incarnée : Jean Jaurès, Léon Blum, François Mitterrand mais également Auguste Blanqui, Louise Michel ou Jules Guesde pour n’en citer que quelques-uns. Les clivages s’articulent à différents niveaux : autour du modèle de démocratie visé et de la notion de centralisme (fédéralisme populaire vs planification), du rejet du modèle économique du libéralisme économique, des modalités pour obtenir le pouvoir, de la reconnaissance du modèle de lutte des classes comme vecteur unique de mouvement social, de son acceptation du populisme.

• Au 21ᵉ siècle la notion de gauche s’oppose de front aux mouvements illibéraux et libertariens. Elle coexiste mal avec le libéralisme économique qui favorise l’intérêt privé plutôt que celui du plus grand nombre et son courant social-démocrate s’est effondré suite à son impuissance à résoudre les inégalités qui se sont accentuées.

• Certains commentateurs différencient la gauche de l’extrême gauche ce qui accentue la confusion et vise à disqualifier certains courants en y associant la peur liée au côté « extrême ». La France Insoumise est victime de cet amalgame qui tend à vouloir faire croire que ce mouvement n’est pas capable de gouverner. Un élément qui caractérise la structure sociale du 21ᵉ siècle en France est la mise en avant de l’intérêt individuel par opposition au bien commun dans une course effrénée au profit. La crise du Covid en est un facteur aggravant. Je le vois comme une extension du libéralisme économique qui déteint sur la manière dont l’individu se conçoit dans la société dans une compétition de tous contre tous pour l’intérêt d’un petit nombre. Et pourtant notre société a rarement dans son histoire été confronté à de telles urgences auxquels tout mouvement politique doit répondre :

Le premier d’entre eux est lié au réchauffement climatique, à l’effondrement de la biodiversité et ses conséquences pour l’humanité. La question centrale est de savoir s’il est possible de résoudre cette crise tout en conservant un modèle économique basé sur la croissance ou bien reconnaître le nécessaire besoin d’une certaine forme de décroissance. Si l’on fait le constat comme la plupart des analystes sérieux que cette seconde hypothèse est la seule viable alors son corollaire implique de s’interroger sur les compensations sociales à mettre en œuvre pour rendre acceptable pour tous cette décroissance. Ceci passe nécessairement par la définition d’un nouveau modèle économique s’appuyant sur une redistribution plus équitable des richesses.

Notre modèle démocratique est également à revisiter car il ne permet plus l’expression de tous. Le pouvoir politique reste entre les mains d’un petit nombre d’individus dé-corrélés du besoin du plus grand nombre. Le mouvement des Gilets Jaunes est illustratif de cette fracture ; une part importante de la population, écartée du pouvoir et rejeté de la société elle-même, anime une révolte qui n’a été étouffé que par la chape du COVID 19.

Un autre enjeu concerne l’omniprésence de la technologie et la complexité qu’elle engendre. Ceci entraînant une fracture sociétale entre ceux qui maîtrisent les outils et les codes et qui tiennent à conserver cet avantage et les autres, laissés pour compte, qui refusent le système qui les rejette. Il est important d’en repenser les usages ainsi que la surenchère à seule fin de consommation.

Il est donc urgent d’agir et de rassembler ceux qui partagent cette conviction de la nécessaire stratégie sociale pour affronter la crise climatique tout en étant persuadé qu’il faut privilégier les intérêts du peuple plutôt que ceux de l’entreprise privée ; le bien commun plutôt que les profits d’un petit nombre.

La France Insoumise articule depuis sa naissance ses propositions dans le cadre de la dualité éco-socialiste. Au travers de son programme l’Avenir en Commun elle propose des solutions concrètes : la 6ᵉ République pour résoudre la question démocratique, la planification écologique pour affronter la crise climatique, le partage des richesses pour adresser l’urgence sociale et les ravages du chômage.

La France Insoumise est prête à discuter avec tous les mouvements qui partagent ces valeurs afin d’affronter les enjeux de société et d’environnement, de ré-insuffler le débat politique dans la société et redonner du crédit aux structures démocratiques en permettant aux citoyens de reprendre en main leur destin commun.

Jean-Pierre Lorré, membre de la France Insoumise