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  Lettre ouverte au Président de l’université Paul Sabatier

jeudi 30 juin 2011, par Le Webmestre du Café Politique

Pour ceux qui veulent avoir une petite idée de ce qui se passe actuellement dans nos universités. Une bonne introduction au débat sur l’enseignement supérieur et la recherche qui est programmé le 17 octobre. L’invité sera Bertrand Monthubert secrétaire national du PS en charge de ces questions et ancien président de "Sauvons la recherche".

Mr le Président, jeudi 16 juin, des personnels (principalement des CDD) sont venus perturber le déroulement du CTP dans l’espoir que leur exaspération soit entendue. A cette occasion, vous avez répété l’importance qu’il fallait attacher au choix des mots que l’on employait et nous sommes vraiment très heureux de ce rappel tant cela nous paraît également primordial. Cependant, ce rappel venait de votre part comme une sorte de remontrance à l’égard de représentants de la CGT (qui était à l’origine de cette action), vous sembliez juger leurs commentaires malvenus, notamment lorsqu’ils vous reprochaient d’introduire les méthodes du privé dans la gestion de l’université et lorsqu’ils parlaient de mépris à l’égard de certains personnels. Nous voulons par cette lettre dire notre solidarité et notre accord total avec l’analyse qui vous a été présentée par cette organisation syndicale. Ne possédant pas votre art de la communication, nous souhaitons simplement rester au niveau de simples constats factuels afin de voir, si oui ou non, ces propos qui vous ont été tenus s’accordent avec la volonté de faire un usage juste des mots.

Pour l’introduction des méthodes du secteur privé, l’exemple du Pôle de Services Numériques (PSN, présenté comme le remplaçant du CICT) est bien éloquent puisque ce service a été confié, il y a un an, à une personne issue du secteur privé (Cap Gemini). Vous avez été interpelé le mois dernier directement de l’intérieur du PSN dans un courrier qui faisait état de la dégradation des conditions de travail, de la très inquiétante détérioration du « climat psychologique », dans un service tourné vers la production de chiffres (qui n’ont rien à voir avec le C de calcul qui disait la vocation du CICT et dont on espère qu’ils ne résument pas l’objectif du Pôle de Services Numériques). Voilà ainsi de nouvelles méthodes de management directement issues du privé qui, au delà de l’impact sur les relations entre personnels au quotidien, laissent perplexe sur le véritable objectif au service duquel elles sont mises en place. Il nous semble que ces méthodes ne sont pas compatibles avec un service public de qualité, pour lequel un usager ne peut être réduit au statut de client. Suffit-il désormais de définir une « stratégie managériale » pour qu’une stratégie scientifique s’ensuive ? Nous expliquera-t-on un jour pourquoi l’UPS, pourtant forte d’un potentiel humain considérable (que ce soit en terme de personnels administratif, technique et scientifique), est obligée de recourir à une personne extérieure à l’université pour « piloter et animer l’important réseau des informaticiens de l’UPS » (communiqué au personnel, 5 juillet 2010) ? De plus, le coût salarial d’une personne extérieure à l’université, précisément parce qu’il ne s’agit plus de salaires du « public » mais bien du « privé » est réputé très élevé. Pourtant l’université n’hésite pas à débourser la somme nécessaire pour de tels budgets, alors même que la somme de 53 000 euros, réclamée depuis de nombreux mois pour répondre à la demande de reclassement de certains personnels en CDD, pose visiblement beaucoup de problèmes malgré les allégations de bonne volonté qui leur ont été présentées et le déploiement de signes cherchant à manifester la compréhension et l’attention. Nous n’avons toujours pas compris en quoi l’intervention d’une personne extérieure à l’université et au monde scientifique était si utile au point de justifier des dépenses notables en une période qui est à la réduction de la masse salariale. Nous avons par contre la certitude de l’utilité du travail fait par de très nombreux personnels en CDD et comprenons qu’ils ressentent comme méprisante une attitude qui justifie et pratique de tels écarts de traitement.

Mr le Président, vous avez en maintes occasions dit votre très fort attachement au service public et voici à nouveau un point essentiel qui nous rapproche. Il nous semble que la notion de « service public » va automatiquement avec l’idée d’un bien commun dont la préservation passe par des modes d’organisation collégiaux qui donnent la possibilité à chacun de se faire entendre et de participer, car il est toujours quelque peu inquiétant de voir certaines personnes décider pour les autres de ce qui contribue à leur bien. Même si la LRU vous donne de jure un pouvoir proche de celui d’un chef d’entreprise, nous prenons l’affirmation réitérée de votre attachement au service public comme la volonté de maintenir une vraie université publique où la collégialité n’est pas qu’un terme de façade et où les instances élues sont vraiment écoutées. Récemment, dans l’opacité la plus totale, quelques collègues ont créé de nouveaux parcours en L (Parcours Spéciaux des mentions de Licence Mathématiques, Physique, Chimie). Vu que le Conseil Pédagogique de PCA (UFR du porteur du projet) et que la CEVU se sont prononcés contre ce projet, vous nous confirmez bien que, devant une telle unanimité, ce projet de parcours spéciaux ne sera pas maintenu, au moins sous sa forme actuelle ? Une décision contraire marquerait un désaveu qui ne laisserait aucun doute sur la considération accordée à ces instances élues.

Des élections étaient programmées le 21 juin 2011, il s’agissait d’élire les conseils des pôles. La mise en place des pôles est visiblement le grand chantier de la Direction Stratégique de la Recherche (constituée de gens nommés) depuis sa mise en place et l’enjeu semble effectivement d’importance puisqu’il s’agit de la restructuration de l’organisation de la recherche sur la place toulousaine (niveau PRES, Université de Toulouse) pour les domaines scientifiques qui concernent l’UPS. Alors que ces pôles existent depuis plus de deux ans, pourquoi a t-il fallu attendre deux ans pour envisager l’existence d’un conseil formé de membres élus ? Quels seront d’ailleurs le rôle et les attributions de ce conseil ? Cela ne paraissait pas une information superflue au moment de se déplacer pour aller voter... Mais cette élection étant reportée au mois de septembre, il reste du temps pour réparer cet oubli. Pourquoi les personnels n’en ont été informés que quatre jours avant la date prévue du scrutin alors que la commission électorale s’était prononcée depuis déjà plus d’une semaine ? Pourquoi d’ailleurs, dans une université si soucieuse de communication, ce courrier de deux lignes ne prenait-il pas la peine de dire les raisons de ce report ? La situation est tellement ubuesque que bien des collègues à qui on annonçait ce report s’étonnaient non pas du report mais du fait qu’ils n’avaient pas réalisé qu’ils avaient été appelés à aller voter. Et on ne parlera pas de ceux qui ne savaient même pas qu’ils figuraient sur la liste des électeurs ! L’impréparation de ces élections témoigne du caractère flou et improvisé de ces conseils d’élus et laissent craindre qu’ils ne viennent là que pour compléter un effet d’affichage et cela sous-entend peu de considération pour tous les personnels concernés.

Si l’on regarde du côté de l’enseignement, aussitôt la création de la FSI adoptée par le CA de début avril, le mouvement interne des personnels administratifs s’est déroulé en moins de trois semaines, laissant certains personnels dans un véritable désarroi. Est-il besoin de revenir sur cette situation qui a poussé l’ensemble des directeurs de départements et de conseils pédagogiques des UFR MIG, PCA et SVT à s’en plaindre dans une lettre qui vous a été adressée ? Après y avoir notamment déploré « que l’absence quasi-totale de concertation amène à une situation aussi désastreuse : l’unique réunion d’information en présence des directeurs de département où le sujet a été abordé s’est conclue sur la promesse de mise en place de réunions de travail avec les départements qui n’ont jamais eu lieu », ils y exigeaient « que le soutien administratif à la pédagogie soit élaboré et décidé en pleine concertation avec les premiers concernés que sont les directeurs actuels de départements et de conseils pédagogiques ». A nouveau, suffit-il désormais de définir une « stratégie managériale » pour qu’une stratégie pédagogique s’ensuive ?

Mr le Président, nous sommes, nous aussi, très attachés à un emploi le plus approprié possible des mots. Peut-être n’avons-nous pas le même dictionnaire ; le nôtre est le Petit Robert pour lequel le terme mépris marque « le sentiment qui pousse à ne faire aucun cas (d’une chose) ». Alors, oui, quel que soit le côté vers lequel nous nous tournons, nous ne voyons pas de terme plus en adéquation avec les faits que nous constatons et avec ce que nous ressentons. Oui, nous constatons que l’actuelle direction de l’UPS prône des méthodes issues du management privé qui contribuent, en particulier, à saper le fondement collégial indispensable au maintien du caractère public de l’université et nous vous disons notre inquiétude de méthodes qui font fi de la concertation, du dialogue et qui abandonnent tout projet sincère de véritable responsabilisation des personnels.

Respectueusement,

Toulouse, le 27 juin 2011,

Sud-Education, FSU, CGT-FERC