Le Café Politique

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  • Rubrique
  •   I66 Notre système de santé est-il performant ?

    Lundi 7 février 20h45

    Salle de réception du stade de Balma

    Invité : Gérard Bapt

    Député et cardiologue

    Rapporteur spécial de la mission santé pour la Commission des finances

    Président de la mission d’information parlementaire sur le Mediator

    En 2010 dans un rapport de l’OMS notre système de santé, encore à l’époque fortement influencé par le programme du Conseil National de la Résistance, était évalué comme étant le meilleur du monde. Si dans le rapport de l’OCDE publié en décembre 2010 le diagnostic est plutôt positif pour notre système, quelques voyants sont en dix ans largement passés au rouge. Les indicateurs de la santé sont complexes, par exemple l’espérance de vie, qui a un lien étroit avec la santé, ne dépend pas uniquement du bon fonctionnement du système de santé proprement dit. Inversement le fonctionnement du système est un excellent indicateur de la capacité d’une société à s’organiser efficacement et à mettre en pratique la solidarité entre les citoyens. Sur le fond, point n’est besoin d’être un expert en statistiques médicales pour avoir une impression désagréable sur l’évolution de notre système de santé.

    Des affaires fortement médiatisées comme celles de l’hormone de croissance, du Vioxx, de l’achat des vaccins sur la grippe H1N1 ou la dernière en date, celle du Médiator, démontrent que notre système de santé a des faiblesses importantes. Très souvent on peut pointer l’imbrication étroite entre l’industrie pharmaceutique et les décideurs, qu’ils soient politiques ou membres des diverses agences qui gèrent la santé. La France n’a pas su construire un service public indépendant du médicament et l’Europe a attendu 2009 pour rattacher la responsabilité de l’industrie pharmaceutique au commissaire européen à la santé et non à celui en charge de l’industrie. Sur un secteur aussi important que la santé le principe évident qui doit guider les décisions est celui de l’intérêt général et non celui du productivisme concurrentiel.

    Le pourcentage en PIB du coût de la santé est d’environ 12% et il ne fait qu’augmenter. Depuis quelques années le secteur mutualiste essaye de pallier le désengagement de la puissance publique, mais cela ne fait que creuser les inégalités d’accès aux soins. Certes l’augmentation de la durée de vie et la technicisation de la médecine augmentent les coûts, mais la question de l’efficacité du système mérite d’être posée. Outre les dépenses quasi inutiles, comme le remboursement de médicaments inefficaces, il faut améliorer la gestion administrative du système qui représente 7% des dépenses (au lieu de 4% dans pas mal de pays équivalents). Des efforts de mutualisation des équipements et d’organisation du système de soins peuvent, avec l’élimination d’abus, permettre au système d’augmenter son efficacité tout en gardant une bonne efficacité et un accès aux soins socialement juste. Pour autant, la volonté affichée de transformer les hôpitaux en entreprise économiquement rentable ne semble pas crédible. La suppression de lits et de postes par milliers semble plus avoir comme objectif de favoriser le transfert des activités les plus rentables vers les cliniques privées que l’intérêt de la population.

    Si on ne veut pas créer des écarts énormes entre régions et entre classes sociales, la solution néo-libérale qui revient à laisser les gens se soigner au prorata de leurs moyens est inacceptable. De même proposer de régler la question de la dépendance par le recours obligatoire à l’assurance privée est un recul sur les principes, mais est bien en cohérence avec le désengagement actuel de la puissance publique sur les questions de santé.

    La formation des médecins est un système assez archaïque qui a résisté à toutes les évolutions. Le développement de leur esprit critique n’est pas le point fort de cette formation et après quelques années d’études on peut s’étonner de leur manque de connaissances statistiques indispensables à une bonne appréhension des questions épidémiologiques Dans "La recherche biomédicale en danger", le Pr Even alerte sur le déclin de la recherche biologique et médicale française, dénonçant notamment la bureaucratie et la gérontocratie qui pénalisent les jeunes chercheurs. Les carrières de chercheurs proposées aux jeunes les plus brillants sont nettement moins rémunératrices que les autres activités médicales. Le médecin, dernière grande figure de la notabilité, doit s’adapter à la modernité, s’il ne veut pas apparaître comme un privilégié arc-bouté sur ses avantages.

    La responsabilité des politiques est donc immense. Réduire l’excès de pouvoir de l’industrie pharmaceutique, proposer aux jeunes une formation adaptée, encourager la recherche de haut niveau, proposer une politique de prévention efficace, garantir l’accès aux soins de qualité à tous et cela dans une enveloppe budgétaire raisonnable. Faire naïvement confiance aux lois du marché pour remplir ces objectifs, comme cela semble être le cas depuis quelques années, est une illusion... voire un mensonge.

    Pour parler de tout cela nous avons invité Gérard Bapt, le député de notre circonscription, à la pointe du combat contre les dérives du système de santé, et conscient des enjeux économiques ce sera un interlocuteur de choix pour une soirée qui s’annonce passionnante