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  La dégradation de l’écosystème nous sauvera- t-elle du capitalisme ?

mercredi 2 mars 2005

La dégradation de l’écosystème nous sauvera- t-elle du capitalisme ?

Regardons les injustices, les assassinats, les horreurs qui nous sont contés tous les jours et pour quelles réactions ? Le TPI, l’ONU, etc... sont censés protéger les hommes des excès d’autres hommes. Mais nous voyons bien que de la Tchétchénie à l’Afrique, en passant par le Moyen Orient ou l’Amérique du Sud, les horreurs n’entraînent ni solidarité immédiate ni réaction globales. Pourquoi ce qui est reconnu comme un mal, n’est il combattu que mollement, et pourquoi l’opinion publique ne réussit pas ou n’essaie pas de faire pression ? Dans une société ou tout se sait, l’individualisme comme art de vivre semble la réponse à ce paradoxe. Mais l’individualisme a une limite claire : dès que les problèmes arrivent dans la sphère personnelle, ils prennent une grande importance. Ce constat fait, quel rapport avec l’écologie ? Et bien, voilà qu’arrive la destruction de l’écosystème. Elle touche tout le monde, presque indifféremment, que l’on soit riche ou pauvre, quelle que soit la situation géographique, quelles que soient nos opinions. Et il y a des raisons, des causes de plus en plus évidentes, identifiables et certaines identifiées consensuellement. L’inhumanité du libéralisme économique se retrouve en première ligne. Comment, en effet, ne pas mettre en relation la pollution par l’Erika de centaines de kms de plages et la destruction peut être irréversible d’écosystèmes sous-marins avec les records de bénéfices de Total ? Ce n’est qu’un exemple, mais il met bien en lumière un paradoxe qui va sembler de plus en plus intolérable.

L’écologie a longtemps été peu prolixe en résultats fiables et surtout en identification des causes. Mais depuis la création du GIEC (1), un consensus scientifique s’est dégagé qui à la fois fait le bilan des évolutions climatologiques, de ses causes clairement identifiés et enfin propose des solutions pratiques et chiffre leurs coûts. Nous avons donc une base pour travailler internationalement. Et contrairement aux propos que nous entendons tous les jours, certaines de ces solutions sont à coût nul. D’autres sont plus chères mais quel est le prix de la Terre ? Le dernier rapport du GIEC (qui n’en produit pas souvent étant donné, à la fois, la difficulté d’évaluer les changements climatologiques et celle d’obtenir un consensus entre les différents chercheurs) est alarmant mais propose beaucoup de solutions. Ils ont chiffré l’investissement en pourcentage de PIB, donnée économique reconnue par tous les acteurs économiques actuels. Le chiffre est relativement modéré mais l’application semble autant indispensable en théorie (il n’y qu’à se rappeler le fameux discours de Chirac "La maison brûle et nous regardons ailleurs") qu’impossible à mettre en place en pratique (réduction des budget destinés à la conservation de l’écosystème et de la biodiversité par le même Chirac). Pourtant, cela ne nécessite "que" la mise en place d’un accord (par exemple Kyoto) qui permettrait à tous de se synchroniser et par la même de modérer les effets négatifs sur la sacro sainte économie. Je pense que ce qui bloque, c’est que nous ne pouvons pas vraiment combattre le cancer qui ronge doucement notre biosphère sans examiner en profondeur ses causes et que beaucoup ont peur de ce que nous allons découvrir et exposer à la vue de tous : l’inanité du système capitaliste, sa profonde injustice et ses racines idéologiques (qui sont toujours réduites pour mettre en avant le côté scientifique du capitalisme).

L’économie libérale est insensible à la conservation de notre écosystème. Il y a,bien sûr, les adaptations locales qui vont permettre de ne pas abîmer un endroit précis ou un composant de l’atmosphère précis ( je pense évidemment à l’ozone de haute altitude ) mais, ce qui est gagné d’un côté est perdu de l’autre. Le système semble incapable d’intégrer dans son fonctionnement le coût indirect. Et même, si nous devons suivre les partis majoritaires des États Unis, cela ne peux que nuire à la compétitivité et au profit, base du capitalisme dérégulé que nous connaissons actuellement. Prenons les États Unis qui est le pays qui rejette le plus de CO2 ( le gaz à effet de serre le plus problématique ), avec environ 30% des émissions totales. Ce pays se bat pour n’avoir pas à payer le prix de sa boulimie de pétrole. Et qui peut l’y forcer ? Le problème est global et nous ne pouvons le régler que globalement étant donné l’interdépendance de tous les écosystèmes sur Terre. Il semble que nous ne pouvons pas le régler globalement sans repenser (au minimum) le système économique. Maintenant, comment faire accepter aux industriels une perte de compétitivité qui les condamne à terme (étant donné l’extrême agressivité de la concurrence) si tout le monde ne joue pas le jeu ? Comment faire accepter aux "contribuables" l’effort financier pour dépolluer ou réhabiliter, alors même que les entreprises qui sont responsables sont absoutes, de fait, par la nécessité de compétitivité ? Et enfin, comment faire accepter à un pays pauvre d’être vigilant par rapport à sa production de CO2, alors qu’il peine à nourrir sa population et que la plupart des pays riches ne font aucun effort ? C’est le problème de tous et tous doivent participer à sa résolution, nous pourrions même souhaiter à hauteur du préjudice porté. Il doit être évident maintenant pour vous que je suis de ceux qui pensent que le système actuel n’est pas compatible avec l’écologie et que nous ne pourrons pas faire abstraction à la fois d’un refondement radical (à la racine) de notre économie, mais aussi du mode de vie qu’il a induit, et même son empreinte sociologique. Et cela, est à la fois une chance pour certains et un danger pour d’autres. Nous ne pouvons pas toujours tous gagner lorsque le jeu se fait à somme nulle. Bien, mais quelle différence avec avant ? Et bien la conscience de la majorité de scier la branche sur laquelle nous sommes tous assis. Un retour de conscience collective qui est à la fois indispensable et difficile. Car chacun peut se sentir coupable et personne ne veut changer sa façon de vivre.

(1) Le GIEC ( Intergovernemental Panel on Climate Change (IPCC) en anglais ) Créé en 1988 par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), le rôle du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) est " d’évaluer l’information scientifique, technique et socio-économique pertinente pour comprendre le risque du changement climatique d’origine humaine." Les publications du GIEC sont préparées par trois groupes de travail (GT I, II et III), composés d’une centaine de scientifiques de diverses nationalités. Ces publications sont généralement reconnues comme réunissant le consensus scientifique le plus large sur le changement climatique. Le Troisième Rapport d’Évaluation complet (TAR) du GIEC a été publié en 2001.

Site officiel : http://www.ipcc.ch/

Traduction digeste en trois niveaux d’abstractions du rapport 2001 : http://www.greenfacts.org/fr/dossiers/changement-climatique/niveau-1.htm#1