Le Café Politique

Parce que le citoyen doit penser pour être libre !
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  Demain le monde ; kaléidoscope

dimanche 13 juillet 2014, par Equipe d’animation d’Horizons De Civilisation Toulouse

20 juin 2014 au Grand Parquet : compte-rendu des interventions successives, sorte de kaléidoscope avec des éclairages différents sur "Demain le monde"

1° intervention : Evelyne Cohen-Lemoine intervient sur le travail, concept central, et pointe 4 erreurs majeures :

1. Lutter contre le chômage au moyen d’emplois aidés, car on ne se pose pas la question du travail.

2. On ne parle plus du temps de travail, or 47 pour cent des emplois n’existeront plus dans 40 ans

3. Les revenus et la fiscalité sont exclusivement sur le travail : on ne taxe pas le capital, les machines (cas révélateur dans la grande distribution du remplacement du personnel par des caisses où le client effectue lui-même le travail)

4. TINA est intégré par les individus, comme une fatalité. On assiste à une objectivisation de l’individu au détriment de toute tentative de subjectivisation : on ne retiendra dans le travail que la performance, globale ou non, et on éliminera ce qui relève de la réflexion subjective. Il importe de penser travail et pas uniquement emploi, ainsi que le contenu du travail. Il y a une absence de discours sur le travail. Les seuls qui parlent métier (de manière pétainiste), c’est le FN. Le langage qui est utilisé pour parler du travail, c’est celui du management et on parle davantage de souffrance pour éviter de parler d’exploitation.

2° intervention : Jacques Testard

Il pose une question : La science est-elle l’alliée du libéralisme ? Il prône la distinction entre science et techno-science. Il affirme qu’en France, il n’y a plus de science, il n’y a plus que de l’innovation à des fins lucratives. D’une certaine manière, le chercheur sait ce qu’il doit trouver ! (Il souligne le danger majeur qu’est devenu l’anthropocène, les contraintes anthropiques étant devenues la contrainte dominante, l’activité humaine étant assimilée à une véritable force géophysique agissant sur la planète)

D’où la nécessité d’une science citoyenne : Une expérience : les conférences citoyennes. L’exemple vient du Danemark : 15 personnes sont tirées au sort et on leur demande leur avis sur le sujet. Cela peut concerner les controverses liées aux risques technologiques, mais tout autant les sujets de société. On prend des gens qui n’ont pas d’intérêts particuliers dans ce domaine. On leur adjoint un comité de pilotage qui élabore un programme de formation par consensus. On peut objecter que 15, c’est peu, mais Jacques Testard assure que ce n’est pas le nombre qui importe, c’est la procédure. D’autant plus que l’on peut démultiplier le nombre de conférences tenues en parallèle.

Pour les scientifiques, il faut passer de lanceurs d’alerte à organisateurs de résistance !

Parallèlement aux conférences de citoyens, il y a nécessité de démocratie dans l’entreprise. Il prône le PICRI (Partenariat Inter Citoyens de la Recherche et de l’Innovation), car il y a nécessité de controverses !

3° intervention : Gérard Mauger sur la démocratie

Un problème soulevé, celui de l’abstention. Quelques remarques :

1. l’importance de l’abstention est inversement proportionnelle au niveau des diplômes obtenus par les électeurs, comme si plus on a de diplômes, plus on se croit autoriser à avoir un avis.

2. Un des problèmes est que les marqueurs politiques - les repères permettant de faire la différence entre les options - sont peu lisibles et inopérants.

3. Il est donc nécessaire de clarifier les mots, de nommer les choses aussi proprement que possible.

4. Grâce à l’abstention, la bourgeoisie a réussi à rétablir le suffrage censitaire.

Quelqu’un intervient en soulignant la difficulté de voter en France, l’inscription sur les listes électorales étant un parcours du combattant, alors qu’en Belgique le vote est obligatoire et l’inscription automatique. Mais l’abstention n’est pas un phénomène inéluctable. Des années 30 à 70, il y a eu une remontée de la mobilisation populaire. Il n’y a pas de fatalité de l’abstention.

Une intervention dans la salle souligne que, pour qu’il y ait participation, il faut :

1. Que la sociabilité politique soit raccordée avec la sociabilité sociale ou populaire.

2. Qu’il y ait une espérance sociale : « La Sociale », c’est la possibilité d’un monde où les exclus entrevoient une place.

3. Que l’on puisse s’inscrire dans de grands mouvements de type « union populaire ».

G.Mauger insiste sur la perte du sens du collectif et sur le fait qu’on n’est pas citoyen parce qu’on n’est pas reconnu comme tel. Il convient de ne pas utiliser le terme d’élite, car c’est dorer la pilule aux dominants et de ne pas laisser les réseaux sociaux à la droite… Il faut revivifier l’éducation populaire et reposer les questions de la démocratisation/ re-démocratisation ?

4° intervention : Marie-Hélène Bacqué ( suite au rapport remis au ministre délégué chargé de la ville, écrit en coordination avec « AC le feu »)

Pour favoriser la participation des habitants des quartiers populaires, elle prône la « création d’espaces autonomes » dans une pluralité enrichissante, des espaces de débats reconnus et différenciés pour redonner aux habitants le pouvoir d’agir. Le monde associatif est écrasé par le clientélisme et les expressions singulières. Elle utilise le terme d’ « empowerment » qui met en avant non le pouvoir sur…, mais le pouvoir de faire …

Il est nécessaire de donner à la société civile des contre-pouvoirs. Une pétition a été lancée à l’issue ce rapport fait avec « Assez le feu » pour que 10 pour cent du financement des parlementaires européens servent à la création de ces contre-pouvoirs pour une démocratie d’interpellation citoyenne ! Cela interroge selon elle le fait de « prendre le pouvoir par le haut ».

Il y a rupture entre la classe politique et l’offre politique. La démocratie voudrait que cette offre soit celle du peuple. Mais les inégalités de revenus entraînent des inégalités de reconnaissance. Il faudrait que puissent réfléchir ensemble des intellectuels (ex : chercheurs en sciences sociales ?), des forces sociales (ex : les grands mouvements d’éducation populaire), des groupes de population (ex : les jeunes dans les quartiers)

De plus, les promesses non tenues déçoivent, comme le vote des immigrés aux municipales ou le récépissé imaginé pour lutter contre le contrôle au faciès, deux promesses du candidat Hollande, non tenues !

5° intervention : Michelle Riot-Sarcey

Elle insiste sur la nécessité de faire dialoguer les différentes associations. Il faut, dit-elle, repenser collectivement une alternative. Il faut forger un langage commun, rassembler, élargir pour constituer l’intellectuel collectif (elle fait un parallèle avec 1848)

Elle cite Pierre Leroux « La liberté est définie comme un pouvoir d’agir » (en toute souveraineté). Il faut repenser les choses et non accepter une délégation de penser. Il est nécessaire de mener des débats à égalité de connaissances. Il ne faut pas vulgariser la connaissance, mais la diffuser. Les partis politiques perdent leur force à se limiter à des actions électorales ! Les perspectives sont à repenser !

Depuis 95, les luttes sont considérées comme des luttes de privilégiés, comme manquant de perspectives, comme des luttes de résistance ! Il faut une université populaire pour diffuser la connaissance, car sans connaissance, il n’y a pas de démocratie possible. Il faut une université ouverte (on apprend les uns par les autres) pour réagir contre la mort de la pensée critique. Il importe de démultiplier et diversifier les lieux de formation !

Il faut penser les problèmes politiques en termes de solidarité. La richesse du monde est dans la diversité des relations ( ?? Or aujourd’hui la relation se fait non dans la transparence, mais dans l’opacité ??). On assiste à une méga-ethnie humaine qui écrase la formidable diversité. Et l’OMC a institué la famine dans certaines parties du monde.

Intervention du syndicaliste représentant les intermittents du spectacle Le salariat : c’est faire l’avance de 30 jours à l’employeur qui est le débiteur du « salarié ». Il y a confiscation de la richesse et il faut une autre répartition des richesses. Il faut aussi repenser le travail et la baisse du temps de travail. Nous sommes dans une société qui fonctionne à la peur : il y a infantilisation.

La rupture, c’est de changer de représentation vis-à-vis de la culture et du culturel. Il faut réinvestir le concept d’ « utilité » avec l’idée de « haute nécessité » / par rapport à la première nécessité. La culture est donc bien d’utilité publique, objet de « haute nécessité » !!!

6° intervention : Etienne Balibar sur la question du travail et de la démocratie.

Deux questions importantes : Pour Marx, le travail est ce qui structure la société des hommes. Parler du communisme, c’est articuler travail et démocratie.

Or, il y a actuellement un discrédit sur la démocratie, car elle a été instrumentalisée, notamment à travers les affrontements entre les systèmes sociaux du capitalisme et du socialisme. Le capitalisme s’est emparé du concept « démocratie » et l’a perverti. Mais on peut penser avec Badiou que l’idée de communisme revient. Cependant il ne peut y avoir de communisme sans démocratie et il convient d’analyser les rapports dialectiques entre communisme et démocratie. Gramsci définit le communisme en disant que c’est la démocratie généralisée.

Puis Balibar revient sur l’idée d’ « empowerment », ce « pouvoir d’agir » en le rapprochant de l’idée de Spinoza d’ « augmentation de la puissance d’agir » et c’est bien de ce que Gramsci appelle la démocratie expansive dont nous avons besoin !

Il rappelle ensuite que la démocratie comporte essentiellement une dimension conflictuelle. Pas de démocratie sans lutte, car sans lutte et sans conflit, elle dépérit. La vigueur de la vie démocratique en France était liée à la vitalité d’un mouvement ouvrier, social et non à l’excellence de ses institutions ! Or à la suite du conflit entre les systèmes sociaux (capitalisme/ socialisme), le capitalisme a monopolisé l’idée de démocratie. Et l’effondrement de l’idée de démocratie est lié au mépris, à l’ignorance de ce qui fait la vitalité de la vie politique. La dimension conflictuelle est niée, interdite. Or Marx a pensé la lutte des classes comme moteur de l’histoire pour dépasser le conflit et non pour s’en servir, ce qui pose problème. (cf. les pays de l’est)

A présent tous les mouvements se réclament du communisme : démocratie participative, autogestion, Indignés, Printemps arabes, Occupied Wall Street…. Le communisme, c’est maintenant, ce n’est pas de l’ordre de l’avenir, le jour où les conflits seront réglés !!! mais il est d’actualité ! Balibar rappelle que la question qui hantait les pays de l’est était de savoir apprécier la phase d’avancement du socialisme afin de savoir si on était enfin au bout de la lutte des classes… Ce n’est plus du tout ainsi qu’il faut penser le monde. Le communisme est déjà à l’œuvre dans les résistances, dans les propositions alternatives que les citoyens éprouvent entre eux quand ils ne s’en remettent pas aux institutions. La « cosmopolisation » peut donner à penser que les formes de participation peuvent être très larges, laissant émerger l’ « empowerment ». Mais attention à la tendance à ne pas voir d’autres formes, à faire l’impasse de l’état de la situation et de la surpuissance du capitalisme financier. Une question se pose : le parti, quelle est sa capacité de résistance et dans quelle mesure est-il récupéré par le système ? Car on ne peut pas ne pas se poser la question de l’organisation !

Puis Balibar est revenu sur le caractère conflictuel de la démocratie. Il affirme tout d’abord que le maintien des institutions antérieures n’est plus une option, car le statu quo n’est pas tenable ! Il n’y a plus de démocratie d’équilibre possible : soit on est dans un processus de dé-démocratisation, soit on s’engage dans un processus de re-démocratisation. Il est urgent et nécessaire d’entamer un tel processus . L’immobilité, l’immobilisme ne sont plus envisageables. Ensuite il introduit la question de la transnationalité et il dit que l’adversaire n’est plus national et que la citoyenneté n’est plus liée à la nation. (En annexe : le texte sur les frontières d’E. Balibar). Puis il a répondu à une question en soulignant qu’entre les deux tendances, une qui veut s’emparer de l’appareil d’état et l’autre, plus spontanéiste, faisant comme si l’état n’existait plus, le dilemme perdure.

7ème intervention : Geneviève Azam

Qu’en est-il du terrain sur lequel nous nous battons ? Elle revient sur ce qu’avait soulevé Michelle Riot-Sarcey qui demandait de ne rien négliger de ce qui se passe dans la société : nous sommes engagés dans des réflexions ; il y a une grande diversité, avec ses contradictions, mais qui ne doit pas être pensée comme simple fragmentation

Elle affirme que nous ne sommes pas dans une crise, mais dans un basculement du monde. On se pose en effet la question de la pérennité du monde. Le capitalisme financiarisé n’a plus de promesses, il n’a plus que des menaces ! (ce qui est très différent des 30 glorieuses !) La croyance dans un salut qui serait la technique et la croissance est une religion qui n’a plus beaucoup de fidèles.

Les grands problèmes étaient déjà là dans les années 90 :

• Remise en cause du productivisme

• Prise de conscience des problèmes écologiques

• Questionnement sur la croissance

• Capacité collective à s’autolimiter

• Remise en question de la notion de propriété avec la question des communs !

La difficulté réside dans le fait que la société s’est massifiée, mais pas démocratisée. Nous vivons la fin de la social-démocratie qui ne peut plus adapter cette phase du capitalisme. La lutte politique a été délaissée pour des luttes quantitatives. Il faut absolument se réapproprier les luttes. Il y a eu une dernière intervention dans laquelle l’intervenant a rappelé que les acteurs dans les luttes étaient de plus en plus divers (paysans, consommateurs radicaux…) et que la croissance économique aujourd’hui détruit l’emploi.

Complément

Intervention de Christian Maurel du samedi 5 juillet 1014 à Marseille/Frioul pour la cinquième "Rencontre avec Médiapart

Nous ne sommes pas et n’avons jamais été en démocratie !

Cette intervention s’alimente à plusieurs sources : une expérience militante et professionnelle en éducation populaire (MJC, Universités populaires), des travaux de recherche sociologique, des lectures, la réflexion du collectif national « Education populaire et transformation sociale », l’élaboration collective d’un travail visant à répondre à la question suivante :quelle(s) alternative(s) démocratique(s) à la délégation de pouvoir ?

Répondre à la question posée suppose que l’on réponde préalablement à la question suivante :

- Dans quel régime politique vivons-nous ? Nous ne sommes pas et n’avons jamais été en démocratie. C’est un abus de langage que de le dire. Nous sommes en fait dans une « aristocratie élective » (Rousseau) délégataire et représentative (Sieyès) qui a dérivé vers une aristocratie héréditaire oligarchique. Elle est héréditaire sociologiquement et quelques-fois même familialement par transmission des charges et des mandats. Elle est oligarchique (souveraineté d’un petit nombre) et matinée de ploutocratie (pouvoir des plus riches indirectement ou directement), de technocratie (importance des experts / « énarchie ») et souvent de gérontocratie (poids des plus anciens), ce qui peut expliquer que les plus jeunes ne s’y reconnaissent pas.

On comprend alors pourquoi, selon une enquête de décembre 2013 (IPSOS/CESE), 87% des français considèrent que les responsables politiques ne se préoccupent pas de ce qu’ils pensent.

Comment sortir de cette situation qui peut nous conduire au fascisme ou au chaos, où seule règnerait la loi du plus fort et où l’homme redeviendrait « un loup pour l’homme » (Hobbes) ?

Les Hommes doivent prendre leur destin en main et reprendre l’initiative politique. Voici ce que nous proposons à discuter et à mettre en place :

- définir ou redéfinir une démocratie possible et réalisable qui s’inspire d’une longue tradition philosophique et politique qui va d’Aristote à Paul Ricœur et qui peut se formuler ainsi : est démocratique une société qui se reconnait divisée, c’est-à-dire traversée de contradictions d’intérêt, mais qui s’attache à donner à chacun et à parts égales, le droit, la possibilité et les compétences de s’exprimer sur ces divisions, de les analyser, de faire des propositions, d’en délibérer en vue de les arbitrer.

- pour mettre en place ce type de démocratie qui engage les individus sur toutes les questions qui peuvent les concerner, il faudra changer les institutions politiques républicaines en place, ce qui suppose l’élaboration d’une nouvelle constitution et, sans aucun doute, le passage par des Etats Généraux de la transformation sociale et politique mobilisant l’ensemble de la population et pas seulement les actuels citoyens.

- Cela impliquera que chacun devienne co-élaborateur des lois, règles, programmes et politiques publiques, et à avoir autorité sur l’économie, la production et le partage de la richesse et des biens nécessaires à une vie bonne.

- Ainsi la souveraineté politique ne saurait s’aliéner, même par un vote délégant cette mission à des citoyens « librement » choisis. Les votes porteraient sur ce qui nous apparaît l’objet essentiel de la vie politique (constitution, projets de lois, programmes) et non sur des personnes, celles-ci pouvant être tirées au sort avec possibilité de révocation respectueuse du droit. « Il est démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort, et oligarchiques qu’elles soient électives » écrivait déjà Aristote dans Politique IV, 9, 4.

- Il s’agirait alors de s’engager dans une pratique instituante de communs (eau, énergie, savoirs, culture, éducation…) qui ne seraient privatisables et appropriables ni par le marché ni par les Etats, et qui relèveraient ainsi d’un droit d’usage bien plus que d’un droit de propriété. Selon Pierre Dardot et Christian Laval, le « commun » devient ainsi un principe politique guidant un processus de co-activité démocratique instituant des communs inappropriables. Cette co-activité démocratique et instituante est comparable à la conception que Marx et d’Engels se faisaient du communisme : « Pour nous le communisme n’est pas un état de choses qu’il convient d’établir, un idéal auquel la réalité devra se conformer. Nous appelons communisme le mouvement réel qui abolit l’état actuel des choses. Les conditions de ce mouvement résultent des données telles qu’elles existent actuellement » (L’idéologie allemande / Pléiade, p 1067).

- Mais pour cela, il faut des démocrates ayant les compétences juridiques, éthiques et intellectuelles permettant de réaliser collectivement la démocratie, en quelque sorte « un peuple de Dieux » (Rousseau, Contrat social, III, 4). Cela implique :

* de former des habitus politiques démocratiques avec des aptitudes à s’exprimer, à analyser, à proposer, à délibérer et à arbitrer.

* de transformer les missions du système d’enseignement dans le sens de l’institution, de la pratique et de la préservation démocratiques des communs ainsi que dans le développement de facultés politiques nouvelles qui ne se limitent pas à l’acquisition de savoirs utiles à une insertion professionnelle et sociale conforme aux exigences actuelles du marché. A ce titre, le projet d’Instruction publique défendu par Condorcet en 1792 a encore du sens.

* de continuer par une éducation populaire associative et une pratique des médias qui auraient des missions multiples et convergentes : expérimentation, conscientisation, émancipation, augmentation de la puissance individuelle et collective d’agir débouchant sur la transformation de soi et des rapports sociaux et politiques. « Sois toi-même le changement que tu voudrais voir advenir » disait Gandhi.

Ce mouvement « d’énergie démocratique du vivre et penser ensemble » est engagé. Les expérimentations sont nombreuses et dans multiples domaines : économies sociales et solidaires, villes, quartiers et villages, politiques publiques impliquant les habitants, co-construction, transmission et partage des savoirs, mouvements sociaux, associations et collectifs d’habitants, création artistique participative…). Partout, sous la forme de « millions de révolutions tranquille » (Bénédicte Manier), des gens s’associent dans la construction de communs, dans la production et le partage de richesses et de savoirs, dans la définition démocratique des rapports sociaux. Un monde nouveau est en marche. Nous sommes en tension entre deux visions, l’une d’un réalisme saisissant, l’autre beaucoup plus optimiste :

- « Il n’y a aucun niveau de souffrance humaine qui, en soi, va faire changer les politiques » (Susan George pour le collectif Roosevelt).

- « Cet émiettement continu qui n’altérait pas la physionomie du tout est brusquement interrompu par le lever du soleil qui, dans un éclair, dessine en une fois la forme du nouveau monde » (Hegel. Phénoménologie de l’Esprit, préface).