Le Café Politique

Parce que le citoyen doit penser pour être libre !
  • Article

  Renaissance européenne

vendredi 17 mai 2019, par Stuart Walker

Les critiques de l’UE sont nombreuses ; elle a grandi trop vite, elle a crée une monnaie unique sans harmonisation fiscale et économique, elle n’a ni une armée, ni un numéro de téléphone , son administration est complexe et coûteuse, elle a un déficit démographique, elle favorise les excès des intérêts financiers, ses frontières sont poreuses, son unité est menacée par des nationalismes. Pour beaucoup elle est restée un machin.

Son bilan est cependant positif. A une exception près, aucun pays membre n’a demandé de s’en séparer. L’expérience de deux conflits mondiaux devraient nous apprendre que la guerre est la plus mauvaise des solutions. C’est cela que l’Union nous a épargné pendant plus de 50 ans, un record historique.

Cette période de paix a été synonyme de prospérité. Un des gilets jaunes, sérieusement blessé pendant une manifestation, a protesté que « on ne voulait que remplir le frigo » On n’est peut être plus très nombreux à se rappeler que les familles modestes de l’après guerre n’avaient pas de frigo. Il en était de mémé dans l’Europe de l’Est pendant la période Stalinienne.

Au contraire de certains pays membres, l’Europe n’est pas surendettée. Cela lui a permis de garder la Grèce sous perfusion le temps que ce pays commence à redresser ses comptes. Elle a eu les moyens d’éviter que la crise économique de 2008 ne devienne un remake des années ’30.

C’est grâce à son appartenance à l’UE que l’Irlande a été amené à signer avec Tony Blair les accords de Vendredi Saint en 1998, mettant fin à une guerre intermittente de 400 ans, un reliquat de l’intolérance qui marquait les guerres de religion. Le nord et le sud, Catholiques et Protestants, ont vu les avantages matériels que pouvait apporter l’élimination de la frontière et l’imbrication de leurs économies.

L’Europe se doit de prouver qu’elle n’est pas démunie face à la montée des nationalismes populistes. Il y a quelque temps il était impensable que l’Extrême droite arrive au pouvoir en France. Si elle emporte de nouveau les européennes, on aura de vraies raisons de penser l’impensable. Les députés français au Parlement Européen ont été remarqués surtout par leur absentéisme , leur manque de propositions et leurs irrégularités financières. En se mettant à plusieurs leur capacité de nuisance sera autrement plus efficace.

En comparant les programmes des 2 principales tètes de liste, on constate, d’un coté un marchand d’illusions, et de l’autre une européenne convaincue qui sait de quoi elle parle. En haut de ses considérations Nathalie L’Oiseau place la question la plus fondamentale, celle du climat, avec une série de propositions positives : une banque européenne du climat, la subordination des accords commerciales au respect des normes environnementales établies par la COP 21, ainsi que des aides à la transformation de l’agriculture et l’amélioration des systèmes de chauffage domestique, une diminution significative des gaz à effet de serre par l’emploi d’énergies renouvelables

On ne peut pas exagérer l’urgence d’actions européenne et globales. Les scientifiques nous ont alertés du problème il y a plus de 50 ans. Depuis nous n’avons pas réussi à faire reculer l’échéance de l’irréversibilité. On constate plutôt qu’elle avance de plus en plus vit. En réalité, il faudrait une véritable révolution industrielle à l’envers, ce qui peut être considérée comme une opportunité.

Si le programme écologique de la majorité ne donne pas satisfaction à Mr Jadot, elle est la plus réaliste de tous ceux qui sont proposés. Les 1000 milliards dont la banque du climat devrait être dotée sont trouvables, si on se rappelle que près d’un milliard a été levé en France en une semaine pour la restauration de Notre Dame . Il n’y a que l’Europe qui peut être chargé d’administrer un tel budget, en vérifiant qu’il ne sera pas détourné. La participation de citoyens tirés au sort dans un Conseil du Climat devrait assurer que les décisions ne seront pas uniquement au bénéfice du Capital.

Le programme alternatif propose de sauver la planète par la restauration des frontières. La Présidente du parti concerné serait apparemment de l’avis que les éoliennes sont mauvaises pour la santé.

Quand Mr Bardella dit que la vague migratoire ne fait que commencer, il pose la bonne question, mais apporte une mauvaise réponse. Étant donné l’embrasement de la majorité des pays Africains, l’emballement de leur démographie et l’écart de niveau de vie qui se creuse entre nos deux continents, l’africanisation de l’Europe est quasiment inéluctable à terme. On a fait tomber un mur à l’Est. N’essayons pas n construire un autre à l’Ouest. A un moment donné c’est la civilisation Romaine qui s’est emparée de l’Europe. Mais même sa puissance ne l’a pas empêchée d’être remplacée à son tour par ses tribus ennemis, dont nous sommes les descendants.

L’essentiel est que cette transition se fasse dans la durée par la concertation , en tenant compte des intérêts réciproques. Ceci passerait par une augmentation important de l’aide au développement, qu’on ne peut laisser aux seuls Chinois. Frontex pourrait être renforcé et transformé en force d’accueil et d’orientation, au lieu d’être une agence de l’incarnation de l’antithèse de l’obligation légale et morale d’aide aux personnes en danger .

Notre continent a passé un cap de dépopulation. La ruralité a besoin d’être repeuplée. Beaucoup de ceux qui ont risque leur vie à la recherche d’espérance , viennent souvent de zones agricoles. On ne peut pas abandonner le glyphosate parce qu’il faudrait biner les champs, et en même temps refuser l’accès à ceux qui seraient plus que volontaire pour y travailler, sous prétexte qu’ils ne sont pas comme nous.

Il existe des villes moyennes en France qui établissent des moyens d’intégration comportant un revenu, une formation (linguistique et/ou technique) un logement, ou un placement en famille, un suivi médicale... Ces initiatives pourraient être décuplées, à l’instar de l’exemple de l’Allemagne. Bruxelles pourrait exercer son pouvoir de persuasion, financière et pédagogique , pour amener un accueil partagé, et abroger la directive de Dublin qui crée un déséquilibre entre, d’un coté l’Italie et la Grèce, et de l’autre la Hongrie ou la Pologne.

Ce n’est peut-être pas exactement ce que Mme l’Oiseau a en tète ; elle a une élection à gagner, et il y a des limites au delà desquelles notre système de protection sociale s’effondrait. Mais ce qu’elle porte est déjà incomparablement plus fidèle aux fondements humanistes de l’Europe, que le repli sur soi prôné par son adversaire qui s’approche dangereusement des théories de la pureté de la race.

N’oublions pas que l’Amérique est devenue une grande puissance en accueillant une grande partie de la misère du monde. Edgar Morin a écrit récemment que si l’Europe cède sue l’immigration, elle céder a sur tout. Dans son nouveau livre sur le sujet, Régis Debray a fait remarquer qu’il faut savoir donner pour recevoir.

Bien sur on pourrait, par indifférence ou cynisme, bouder les urnes et ouvrir les portes du Parlement Européen aux "sabordeurs". Il nous resterait toujours les yeux pour pleurer.